Un lutin à écharpe
Il était une fois, au milieu du Grand Nord, reculé du monde, une grande maison. Dans cette maison vivait un homme à la longue barbe blanche et au manteau rouge. Vous voyez sûrement de qui je veux parler. Cependant notre histoire ne sera pas autour de ce personnage. Il faut vous pencher un peu. Tendre l’oreille et porter un œil attentif aux différentes pièces. Peut-être ainsi vous verrez, courir un peu partout, des petits êtres. Vous savez, ceux à la peau un peu pâle ou multicolore quand ils viennent de tomber dans un pot de peinture. Un peu maladroit, un peu boudeur, travailleur, mais avec un très grand cœur.
Un peu, comme les petits êtres bleus, mais la maison remplace la forêt. Des sucres d’orges, mais pas de salsepareilles. Ils ont eux aussi un bonnet, mais vous pouvez les trouver de toutes les couleurs avec souvent en son bout une clochette qui permet de les repérer. Pas de grand méchant par ici. Ni de chat au rire démoniaque. Seulement un gros félin, qui aime un peu trop les câlins et se prélasser devant la cheminée.
Si vous déplacez un livre dans la bibliothèque, vous accèderez au village. Un endroit un peu tordu où les maisons sont toutes uniques, reflétant la personnalité du propriétaire. Non loin de ce lieu un petit tunnel. Ce dernier mène à l’atelier, là où les rêves des enfants prennent vie. Là où les lettres arrivent par centaines et où les petits êtres s’affolent.
Un jour, un nouveau petit lutin arrive à la maison du père Noël. Il est un peu perdu. Mais on lui fait rapidement une place pour qu’il puisse s’installer en lui laissant libre accès à l’atelier pour qu’il ait le choix dans les décorations. Il devait personnaliser son lieu de vie. Une sorte de petit rituel dans ce village peu ordinaire. Une manière de se présenter aux autres sans un mot.
Il range rapidement ses affaires dans le petit placard et part à la recherche de quelques babioles. Il ne sait pas encore quoi faire. Mais il espère qu’en se baladant il trouverait son bonheur. Il tombe alors sur un harmonica. Il le met dans sa poche et continue sa visite et chasse aux merveilles.
Après avoir ramassé et négocié quelques objets, il se retrouve les bras bien pris. Il ne sait plus très bien où aller. Ni s’il arrivait à rentrer chez lui. Soudain, il sent que le poids sur ses bras diminue et que la vue lui revient un peu, juste assez pour voir le chemin. À ses côtés, un lutin avec une grande écharpe jaune et noire porte l’un de ses cartons de bidules.
Sans un mot, il le suit. Le lutin à l’écharpe semble connaitre le chemin et rapidement, ils se retrouvent sur le seuil de la maison du plus jeune. Ce dernier n’a pas le temps de poser ses affaires pour remercier son bienfaiteur comme il se doit qu’il est déjà reparti. Il est un peu triste. Il voudrait le remercier. Il se demande s’il le reverra tout en commençant à installer les décorations.
Tout à coup, il entend une musique ou plutôt juste un instrument et une voix. Il s’arrête dans son travail artistique et va voir en extérieur. Il trouve l’origine du son chez son voisin. Il est assis sur le pas de sa porte et joue d’une toute petite guitare. Un ukulélé. Il chante puis change les paroles pour s’adresser à son nouveau voisin. Il lui indique que le lutin à l’écharpe est bien connu du quartier. Le rayon de soleil de la bibliothèque. Il brille très fort, mais il est difficile de l’attraper.
Le petit discute avec le chanteur un moment puis lui demande une simple chose « si tu pouvais lui dire une chose, tu lui dirais quoi ? ». Le chanteur lui demande alors de repasser un peu plus tard le temps de l’écrire et le plus jeune commence alors son tour du quartier. Guidé d’une maison à l’autre par le propriétaire précédent. Récoltant dans un carnet des phrases, des textes, des mots. De simples captures d’instant, de souvenirs, de compliments, des mots. Sincères et honnêtes.
Il arrive chez lui pour faire à son tour un mot. Et au moment où il va pour partir son voisin lui glisse dans les mains une nouvelle page à ajouter. Le petit se rend alors chez l’Écharpe. Il est un peu timide quand il toque à la porte. Il ne sait pas si on lui ouvrira. Il n’a peut-être pas toqué assez fort. Il dépose alors le livre sur le tapis. Puis laisse simplement la magie s’emparer de l’instant…