A supposer que

    A supposer que la musique, cette douce imbrication, non pas que nous parlerons de maçonnerie par ici et par ces quelques mots, même si la métaphore des travaux manuels, comme les métiers du bâtiment, mais aussi les arts les plus minutieux, pour ne citer qu’eux, l’on pourrait aborder le sujet d’un qui est très adapté, mais je crois qu’ici n’est point la question, que je repositionne de ce pas, ou plutôt dans l’instant au plus rapidement, enfin rapide le temps de quelques mots pour retourner à ces notes, pas celles que l’on pose dans un coin d’un papier et que l’on ne relit quand relecture il y a, que rarement, pas celles dans le téléphone, outil de technologie très développée qui accélère en ralentissant les interactions, que nous avons entre nous, nous qui sommes humains utilisant la technologie pour communiquer avec les autres sans nous comprendre parfois, celles de nous encrons sur les partitions, ces lignes parallèles lues, comme on peut lire de la musique, car je ne me considère pas ici comme experte dans le domaine, mais comme simple admiratrice du travail des musiciens et virtuoses dans le domaine, dans une certaine globalité, guide, tel le fil d’Ariane dans un labyrinthe qui se pourrait être celui de la vie dont on cherche tous la sortie sans vraiment la trouver, ne trouvant qu’un chemin s’en approchant la frôlant parfois, nos pas, qui se dessinent dans la neige franchement tombée si on suppose que le climat s’y prête, vais-je si, nous entrons ici dans une nouvelle interrogation, en espérant que vous n’avez pas oublié le début de la phrase qui devient de plus en plus longue, à mesure que je continue de l’écrire et de la former sous de nouveaux mots qui se rajoutent à la suite des autres, je n’entends rien ?

 

    À supposer que la musique guide mes pas, où vais-je si je n’entends rien ?

Notre différence

    Il y a ces jours où écrire peut faire du bien. Où poser de simples mots sur le papier ou l’ordinateur aide à aller mieux. Où juste des lettres les unes à la suite des autres s’enchaînent sans forcément de raison. Mais faut-il toujours écrire avec une raison ? Avons-nous toujours une raison d’écrire ? Ne pouvons-nous pas tous simplement laisser notre corps choisir ce qu’il a envie de faire ? Ce qu’il a envie de dire ?

 

    Et si, nous laissions notre cerveau de côté ? Et si, nous laissions notre corps s’autoguider ? Arrêtons de nous auto barrer la route et d’être nos propres marionnettes aux ficelles de fer. Nous sommes bien plus que cela. Bien plus que de simples robots analysant les autres pour mieux s’intégrer. Bien plus que des caméléons imitant les réactions communes pour passer inaperçus.

 

    Qui sommes-nous vraiment si nous ne sommes pas nous-mêmes à cent pour cent ? Qui sommes-nous quand nous avons ce masque de la société ? Qui est ce masque qui fait partie de nous et que nous avons tant de mal à retirer ou simplement accepter ? N’est-ce pas une facette de notre personnalité que l’on aimerait être au plus profond de nous et que nous servons comme illusion à autrui ?

 

    Nous sommes faits pour le théâtre. Nous ne sommes que de grands acteurs sur la scène de notre propre vie. Mais nous sommes aussi de piètre comédien quand il s’agit de jouer son propre rôle au naturel. Nous nous adaptons. Nous imitons. Nous analysons. Nous faisons comme les autres pour paraître moins bizarres. Moins nous-mêmes. Plus eux-mêmes.

 

    Et si la marionnette brisait ses chaines de fer ? Elle pourrait danser et agir comme bon lui semble. Elle pourrait aller voir cette personne dans un coin pour lui l’inviter sur la piste. Elle pourrait rayonner au centre de la scène de son propre théâtre miniature et faire valser les frontières qui l’encadrent. Elle pourrait découvrir le monde et oser sans se faire retenir par les fils de la société.

 

    Et si le robot mettait fin aux analyses ? Il pourrait laisser son cœur choisir. Le laisser le guider et lui dire ce qui est bon. Il pourrait se faire confiance pour aimer ou détester. Il pourrait dire non comme oui avec ferveur. Il ne se priverait pas. Il ne se bloquerait pas. Il pourrait répandre ses sentiments colorer sur la toile grisâtre des lignes de codes et circuits imprimés qui guident ses analyses et ses actes. Il pourrait être libre de lui-même.

 

    Et si le caméléon arrêtait l’imitation ? Il pourrait ne plus être un simple mouton dans le groupe. Il pourrait s’affirmer et aller à contre-courant. Il pourrait dire et faire ce qu’il pense sans avoir peur du jugement. Il pourrait envoyer en l’air les codes et les règles absurdes que l’on respecte sans savoir pourquoi. Il pourrait être celui qui s’inquiète et qui est attentionné juste pour le plaisir et sans attendre une chose en retour. Il pourrait être lui tout simplement.

 

    Et si le masque tombait pour de bon ? Nous ne serions pas plus bizarres ou différents. Nous serions juste uniques et nous-mêmes. Nous serions les meilleurs acteurs de cette scène, car nous ne jouons pas. Non loin de là. L’authenticité. La spontanéité. L’originalité. Nous sommes nous jouant à la perfection notre propre rôle que nous avons-nous même écrit. La société n’est pas le metteur en scène du théâtre de notre vie, elle est une simple figurante et nous en sommes à la fois, acteur, scénariste, metteur en scène, réalisateur, accessoiriste, et public. Nous rions, pleurons, râlons, aimons dans ce théâtre, mais avant tout nous sommes nous.

Il était une fois

    Il était une fois, il y a fort longtemps, dans un petit village perdu au milieu des bois, un jeune homme des rêves pleins la tête et des…

             

    Non, mais écoutez-le, on dirait qu’il va nous rejouer un de ces contes pour enfants de cape et d’épée ! « Il était une fois, il y a fort longtemps dans un village perdu… » Et puis quoi encore ? Un dragon ? Des combats à l’épée ? Une princesse à sauver ? Tu ne peux pas trouver mieux, là tu es plus que dans le cliché mon ami. Aller reprends donc, un peu plus original cette fois-ci.

             

    Donc… il n’était pas une fois, dans une grande ville mondaine…

             

    Stop. C’est quoi ça ? Je t’ai demandé un truc original pas totalement décalé. Reprend avec ton « Il était une fois » c’était pas mal.

             

    Il était une fois, dans le petit village de Vignes-Raisins, un jeune homme. Un jeune homme au look banal, rien de bien original. Il aimait bien rêver, rire et jouer. Il ne pensait pas vraiment au lendemain.

             

    Tu es vraiment sérieux avec ton histoire ? Tu ne peux pas faire un peu plus original ? Un gars paumé, qui rêve et qui ne pense pas au lendemain… « Carpe Diem » ? Dis-moi que c’était une blague… tu ne peux pas lui donner un peu de peps, d’innocence, de vie, d’histoire ! Un peu de magie ! Je sais pas moi change d’univers, au lieu d’être dans le Moyen Âge et la fantasy, bascule dans le fantastique. Rajoute des Minotaures.

             

    Des Mino quoi ?

             

    Des Minotaures, faudrait que tu revoies ta mythologie. Enfin, tu vois ce que je veux dire ? Aller reprend. J’essaye de ne plus t’interrompre. Enfin j’essaye…

             

    Reprenons alors…

 

    Il était une fois, dans un petit village français, une maisonnette où vivaient un jeune homme et sa mère. Si l’ambiance pouvait avoir une couleur, elle serait grise. Ternie par les larmes qui coulaient. Noircie par la disparition de la fille et sœur. Ce faisait un an jour pour jour que celle-ci n’était pas rentrée à la maison. Un an que le frère remuait ciel et terre pour la retrouver. Sa mère, elle était trop fatiguée. Il lui avait promis. Il voulait tenir sa promesse. Alors malgré le jour symbolique, il se décida de retourner au village voisin pour tenter de nouveau d’avoir des renseignements. Son ancienne piste l’ayant conduit à une impasse, il devait tout reprendre…

 

    Notre jeune Jack était motivé. Il ne doutait pas qu’un jour, il retrouverait sa sœur et le sourire de sa mère apparaîtrait de nouveau. Il espérait pouvoir trouver une nouvelle piste aujourd’hui. Une piste qui le mènerait jusqu’à la disparue. Mais en attendant, il marchait dans les rues pour rejoindre le port Quiberon côté Initié. Un de ses amis de l’équipe de Baseball local avait réussi à avoir des informations. Il avait rendez-vous. Il avançait, avançait vers cet espoir, lorsque sa route croisa ou plutôt heurta celle d’une jeune fille qui semblait bien affolée…

 

    – Doucement, mademoiselle, que se passe-t-il ? Je peux vous aider ?

 

    La jeune fille aux larmes qui s’écrasaient sur le sol avait un peu de mal à parler. Puis son regard sembla attrapé par quelque chose et elle bredouilla deux ou trois mots.

 

    – Mon chaton… échappé…

 

    Héros au grand cœur…

 

    Ne me dis pas que tu vas le faire courir après le chat ? Il a sa sœur à sauver, déjà j’ai rien dit pour les clichés, mais là… Tu ne vas pas faire cela, si ?

 

    Héros au grand cœur, Jack rassura la jeune fille d’une main sur l’épaule et s’élança à la suite du quadrupède dans le dédale des rues. Oubliant l’espace d’un instant son objectif premier.

 

    Tu m’ignores maintenant ? C’est nouveau. Puisque c’est comme cela continue dans ta non-originalité…

 

    Il poursuivait le chat d’un noir se mêlant aux ombres à travers des rues qu’il ne reconnaissait pas forcément tout. Il ne réfléchissait pas vraiment. Il esquivait les passants et les autres animaux pour atterrir dans une petite ruelle de la ville assez étroite. Il entendit un miaulement, il eut tout juste le temps de sauter par-dessus le chaton avant de faire deux pas et tomber à la renverse trébuchant sur quelque chose ou plutôt quelqu’un.

 

    – Vous pourriez prensdre grand-garde…

 

    Le héros releva doucement la tête. Face à lui, un chat aux yeux vairons le regardant fixement. Ce n’était pas son chat. Celui-ci semblait bien accompagné. Sûrement le père du petit évité peu de temps auparavant.

 

    – Il est haustement disgracieux de choir sur meilleur que toi de cette manière socialement fort discourtoise !

 

    Jack était confus, pensant sur le coup s’être cogné la tête un peu fort.

 

    – Un chat qui parle ? Je dois…

    – Or donc rustre enfançon, m’est avis que tu pourrais t’élever de ton séant ! Je ne suis guère un vil félin crasseux et vagabond ! Il m’incombe de te révéler que nous sommes vertueusement dissonants.

 

    Jack n’en croyait pas ses oreilles. Il ne se fit pas prier et se leva d’un bond. Faisant peur à la petite troupe de chats aux yeux particuliers au passage. Il examina le sol et remarqua une petite forme s’essuyant la poussière. Il s’accroupit à sa hauteur et commença à approcher la main comme pour vérifier ce qu’il voyait, mais se prit une tape dessus par l’objet en mouvement.

 

    – Aïe. Depuis quand une… enfin un machin comme cela parle et en une sorte d’ancien français en…

    – J’exige un minimum de respect en mon endroit, Je ne suis point objet de gueuserie. Et j’eus pu être ton concepteur au regard de mon âge ! Un initié au funeste destin tel que moi, maléficié à vivre mille tourments, claquemurés dans un jouet pour enfant. Mais… mais quelle est donc cette effronsterie ? Repose-moi séance tenante !

    – On va voir l’initié-médecin de la ville, il aura sûrement une solution. Il n’est pas loin…

 

    L’objet à la forme d’ourson en peluche et tout d’engrenage vêtu sous le bras, le jeune homme s’élança dans les rues. Tentant de retrouver son chemin, jusqu’à l’antre des potions et runes de l’ancien. Il l’avait bien guidé. Un ancien ami du père de Jack, le vieil homme à la longue barbe grisonnante, vivait près de ses ustensiles. Toujours prêt à créer une nouvelle potion, un nouveau remède. Il aurait certainement la réponse aux questions de notre jeune héros et de son problème de chose parlante.

 

    Quelques minutes plus tard, le jeune homme franchit un peu essoufflé la porte de la petite boutique. Elle regorgeait de mystères et d’objets en tous genres. Des pendentifs runiques aux chaudrons en passant par des poupées vaudou et des fioles remplies de substances aussi étranges les unes que les autres. Jack s’attarda un instant. Il observait, analysait. Il avait l’impression que ce lieu avait sa propre vie et n’était plus le même d’un jour à l’autre.

 

    Alors qu’il se perdait dans ses réflexions, la peluche gigotant toujours sous le bras, des paroles le réveillèrent.

 

    – Bien le bonjour, Jack Junior, comment vas-tu ? Cela fait longtemps que tu n’es pas venu mon ami. Que me vaut le plaisir de ta visite ?

 

    Jack se retourna aussitôt. Le vieil homme aux allures de père Noël se tenait près de lui. Il ne l’avait pas entendu venir trop occupé à tenter de deviner l’utilité des outils sur l’étagère face à lui.

 

    – Bonjour Mr DuChêne, je vais très bien merci. Je suis toujours à la recherche de ma sœur, mais en chemin j’ai croisé cette drôle de… enfin vous voyez, il dit être un initié.

    – Mon nom baptismal demeure ToyNoc, adoubé Sir à une époque où vous n’étiez point né ! Or donc, jeune impertinent, il serait en ma convenance de pouvoir fouler de mes prospres pieds ce sol consacré ! J’éprouve mille ravissements de vous rencontrer, mestre Duchêne. J’ai ouï dire par la bouche même de mon tourmenteur que vous auriez la faculté de m’être d’une précieuse aidance…

    – Désolée Toy, mais je n’aimerais pas que quelqu’un te marche dessus…

    – J’exige le respect de ma titulature : SIR ToyNoc !

    – Vous n’allez pas vous disputer ici, nous devons trouver une solution pour ce monsieur ToyNoc, suis moi Jack, on va dans mon laboratoire…

 

    Jack qui n’avait pas reposé la peluche, suivit l’ancien. Son laboratoire comme il aimait bien l’appeler était un antre des potions dans l’arrière-boutique. Les murs étaient couverts d’éprouvettes et de livres. Le bureau se cachait sous les feuilles et les crayons. Le sol disparu. Il fallait faire preuve de ruse pour marcher sans rien abîmer.

 

    L’homme marmonna quelque chose dans sa barbe et indiqua à Jack de rester à sa place. De son côté, l’homme arbre nageait dans ses notes. Courrait vers les livres qui rejoignaient le sol les uns après les autres. Il semblait avoir une idée en tête et ne voulait pas en démordre.

 

    Tout à coup, un petit bruit attira l’attention du héros. Ce dernier vit sur le sol un petit engrenage en tous points identique à ceux qui ornaient la peluche. Il paniqua alors. Il savait qu’il ne devait rien toucher dans le laboratoire, mais il ne pouvait pas laisser la peluche tomber en morceaux. Il se pencha alors vers le sol discrètement en essayant de ne pas se faire voir par le savant. Il ne voulait pas se faire sermonner. Mais quand il s’apprêta à frôler la pièce de métal, il sentit qu’on le poussait dans le dos et il tomba sur la pièce…

 

    Il va se faire kidnapper par des grands méchants c’est ça ? Quelle imagination !

 

    Tu pourrais me laisser faire ?

 

    Mais oui, mais pas de kidnapping…

 

    Un bruit. Un atterrissage pas des plus agréables sur le sol. Autour de notre héros la forêt qui s’étendait à longueur de vue. Il ne le savait pas, mais il se trouvait toujours dans le pays de la baguette, mais avait changé un peu de zone géographique. Il avait un peu de mal à se relever. Quelque chose était sur son dos et sauta devant lui. Le félin ébène qu’il avait poursuivi…

 

    – Que fait ce chat ici ?

 

    Il se leva d’un coup. Se rappelant qu’il n’était pas seul. Il ne voulait pas se faire remonter les bretelles une nouvelle fois par la peluche. Il se redressa et observa les environs tandis que le chat se rapprochait de l’objet vivant.

 

    – Mais on est où ? Toy ça va ?

    – SIR ToyNoc, je ne suis point un trivialeque austomate !

    – Excuse-moi ToyNoc, mais au fait comment tu es devenu peluche ?

    – Jack, souffre que je te conte ma geste ! Héritier d’une noble ascendance, je ne mansquais de rien, sauf peut-être de ce que les membres de la roture prise tant : la chaleur humaine. Force me fut de considérer mes géniteurs comme des déserteurs, m’ayant asbandonné aux mains de la domesticité. De l’heure où je fus doué de raison, j’abandonnais les tristes considérations matérielles pour m’abreuver des connaissances compulsées dans les grimoires de la bibliothèque familiale. Le temps filait. Les histoires, les contes d’antan itou des temps modernes enflammaient mon imagination. Rien ne me passionnait plus que les récits des hauts faits d’armes des chevaliers. Or donc, je décidais, alors qu’à peine j’eus ton âge, de rendre courtoises visites à ces preux et d’à mon tour, de revêtir l’armure et de partir en quêste. Malgré ton ignorance crasse, j’ose espérer que tu n’es point étranger aux machineries à parcourir le temps ? Apprends que je me suis aventuré à en confectionner une. Mon entreprise fut couronnée de succès. Une seule chose me faisait défaut : une source d’énergie magique. Qu’à cela ne tienne, je montrais ma dévotion en poursuivant vaille que vaille mon rêve. Hélas, la voie des dieux est insaisissable et il y eut un revers de la médaille. L’affaire prit une forte étrange tournure… Je tombais en pâmoison. À mon éveil, je me retrouvais prisonnier de ce corps, mêlant l’ourson en peluche et ma machine. Longue et éprouvante fut mon errance. Mes pas finirent par me mener en cette cité, cette ruelle. La suite, tu en as été témoin…

    – Oui, j’ai couru après ce chat, puis j’en ai esquivé un, je suis tombé sur toi. On est allé voir Mr Duchêne et on a atterri ici. Maintenant nous devons trouver un moyen de sortir d’ici avant que…

    – Songe tel un proton, avec fulgurance, fragile enfantelet.

    – Un proton ?

    – Oui, demeure positif…

 

    Le petit groupe de trois marchait tranquillement. Le chat devant, un pas lent au rythme de la peluche. Ils discutaient quand soudain devant eux une créature apparue. Un loup qui…

 

    Stop. Le coup du loup c’est du déjà-vu. Tu oublies tes classiques ou tu t’en inspires de trop. La belle et la bête cela ne te dit rien ? Aller transforme moi ce loup rapidement…

 

    Quand soudain un serpent à trois têtes apparut. Sûrement…

 

    Échappé d’un zoo ? J’avoue l’idée est belle, mais soyons un peu cohérent avec l’époque et la géographie. Tu as une autre idée ?

 

    Quand soudain, un douchat apparaît. Il grognait. Semblait très agressif. Pourtant ce chat d’initié à trois queues ne l’était que principalement envers les ennemis de son maître. Jack était un peu déboussolé. Il se mit devant l’ourson en guise de bouclier et sortit sa stèle comme arme. Mais il n’eut point le temps de lancer le moindre sort que le chat lui sauta dessus, lui mordant le poignet et récupérant l’objet magique au passage. Le héros n’eut pas le temps de bouger que l’animal était hors de portée de vue.

 

    Il venait de perdre sa stèle et gagner de la douleur. Le jouet semblait avoir un peu de cœur déchirant le T-shirt du héros à sa manière après lui avoir demandé de s’accroupir, et lui fit un bandage sur le poignet. Jack le remercia du regard. La suite du trajet se fit sans un mot.

 

    Le héros se tenait un peu le poignet. La douleur partait doucement. Il n’osait plus dire mot. Le petit groupe était des plus silencieux, ne voulant pas attirer de nouveau des animaux. Jack avait de quoi se défendre, mais préférait ne pas sortir son épée maintenant. Il pensait qu’au moindre bruit ou mouvement brusque ils se feraient de nouveau attaquer. Le chat semblait connaitre les environs. Jack se contentait de suivre alors que la chose parlante elle se battait avec quelques insectes qui venaient l’embêter.

 

    Après plusieurs minutes, plusieurs heures, le temps n’ayant plus vraiment d’importance quand la fatigue commençait à prendre le dessus, ils découvrirent au détour d’un buisson un énorme portail. Il était grand ouvert sur une entrée magnifique, bien entretenue et remplie de verdure, de fleurs et de couleurs. Au bout du chemin, quelques marches et une porte. Une tête de lion en guise de heurtoir. Un animal majestueux par plus d’une fois représentée. Un beau symbole pour ce château immense au cœur d’une forêt…

 

    Tu commençais bien, c’était super l’histoire du croup et là action suivante tu retombes dans le cliché ! Et il se passe quoi ? Tu vas le faire toquer à la porte ?

 

    Oh je n’y avais pas pensé merci pour l’idée…

 

    Le héros s’avançait traversant le portail, guidé par la fatigue et l’envie de se poser sans risquer de perdre la vie. Le chat en retrait et la peluche, elle se tenait aux côtés de notre apprenti chevalier qui fit signifier sa présence à la grande porte en interrogeant le lion.

 

    Une minute à peine passa avant que l’énorme morceau de bois ne bouge. Il s’ouvrit sur une petite tête brune aux longs cheveux qui volaient quand tous les sens à mesure de ses mouvements. Sans un moment pour l’étranger à sa porte, elle s’approcha intriguée de l’objet à ses pieds. Son regard venait de changer et son sourire était celui d’un animal…

 

    – Oh un nouveau jouet, il bouge en plus… Viens que je te dissèque, je vais te retirer quelques boulons… Je…

 

    Clé à molette dans une main, scalpel dans l’autre, elle semblait sérieuse dans sa folie. Jack n’était pas très courageux, il reculait doucement. Peluche, elle s’était accrochée à sa jambe et quand la jeune fille fut à leur hauteur. Quand elle s’apprêta à donner le premier coup…

 

    – Viens là !

 

    Une seconde jeune fille. En tous points identique à la précédente, mais son visage semblait plus… doux. Ses cheveux tressés en arrière. Elle avait un quelque chose plus calme et venait d’attraper l’objet dans ses bras. Sûrement des initiés.

 

    – ToyNoc !

 

    Jack fit un pas, mais fut rapidement arrêté par la jeune chirurgienne. Il prit soin de ne pas faire de mouvement pouvant énerver la brunette tandis que sa sœur paraissait aimer son nouveau jouet. Elle le câlinait puis l’embrassa sur le haut de la tête. Puis dans l’instant, un homme au haut de forme couvert d’engrenages fit son apparition. L’ourson n’était plus, à sa place, un adulte dont le bras disparu était remplacé par du métal. Une redingote, un monocle, une montre à gousset rangé dans le veston. Il semblait venir d’une autre époque et pourtant…

 

    – Et bien, engeances bouffies d’ingratitude ! Est-ce là une manière d’honorer ses démiurges ?

 

    Le héros un peu perdu cherchait le parent numéro deux quand ce dernier passa de chat à jeune femme. Il commença à trembloter. Et recula, petits pas à petits pas. Tandis que la famille se réunissait.

 

    – Je… Je vais vous laisser en famille, ravie de vous avoir rencontré ToyNoc…

    –  Attarde-toi à nos côtés, aimable jouvencet

 

    Une stèle de sortie. Une rune dans les airs, le voilà dans l’inconscience. Cela fut rapide. Simple et efficace. Le sorcier était fort, mais le héros lui était déboussolé par les événements.

 

    Les cachots du grand château étaient sombres et poussiéreux. Des toiles d’araignée décoraient les murs et les recoins tandis que les rats faisaient entendre leur présence à quiconque tendrait un peu l’oreille. L’humidité, la froideur des murs et l’absence de lumière n’amélioraient pas la situation. Le lieu n’était pas des plus accueillants et pourtant nous y retrouvons notre jeune…

 

    – Jack… Jack c’est toi ?

 

    Une voix. Bien connue par le jeune homme. Une voix qu’il n’avait pas entendue depuis un moment, un trop long moment. Mais il la reconnaîtrait entre mille. Au-dessus de lui, lui caressant la joue et en la tapotant parfois, sa sœur. Sa sœur disparut depuis un an. Il venait de la retrouver. Il avait des centaines de questions cependant ils devaient sortir d’ici.

 

    Il savait que sa grande sœur maîtrisait les runes de téléportation or le fait de la voir encore ici lui prouvait sans qu’il ait à demander que le sous-sol devait être bien protégé. Il se releva doucement et chercha une issue.

 

    – Cela fait un an que j’essaye Jack, rien. Il n’y a pas de solution… à part prier.

    – Alors, prions Stella, mais nous sortirons. Il doit y avoir un moyen. Envoyez-nous un signe.

 

    Le jeune homme s’adressa au plafond. Comme si les étoiles pouvaient lui répondre. Il n’y croyait pas lui-même quand une voix se fit entendre.

 

    – Le Sir a un secret caché dans la bibliothèque.

    – Mais où est cette fameuse bibliothèque ?

    – Rapproche-toi des étoiles et tu la trouveras.

    – Mais cela ne nous aidera pas à sortir d’ici.

    – Des mots non, mais ceci peut-être…

 

    La fille à la tresse était là. Elle semblait différente moins en retrait. Elle tenait la clef dans la main et la tourna dans la serrure. Le frère et la sœur ne comprirent pas. Devant les regards d’incompréhension, cette dernière ne put s’empêcher de laisser échapper quelques mots.

 

    – Il faut mettre fin au mystère et j’ai besoin de changer d’air.

 

    Jack comprit où voulait en venir la petite. Il posa une main sur son épaule et glissa l’autre dans sa poche. Il en sortit un fourreau qu’il accrocha à sa ceinture et un bouclier qu’il scella à son bras. Même blessé, il était prêt.

 

    – Je vais vous sauver, attendez ici mon signal.

 

    Notre héros s’élança. Montant les escaliers quatre par quatre. Il cherchait à atteindre les étoiles. Son but : trouver la bibliothèque. Il ne tarda pas à trouver l’antre des savoirs. Il avait pris soin d’éviter le chat, mais il n’avait vu personne comme si dans le château ne vivaient que des fantômes. Comme si tout cela n’était qu’un rêve.

 

    Il referma derrière lui la porte. Les pages de connaissances étaient de partout. Les murs entiers étaient recouverts jusqu’au plafond qui semblait monter toujours plus haut. Au sol, des bureaux bien rangés. Un globe au centre de la pièce et dans l’axe de la porte un tableau. Sur le seul mur où aucun livre n’était présent. Il s’avança.

 

    – Tiens tiens tiens ! Je perçois ton avidité curieusante face à cette toile de mestre ! L’être représenté, noble esseulé, devint foldingo quand sa moitié trépassa. Aux affres de la vengeance, il n’eut de cesse de vouloir la restrouver. Las, son âme se fourvoya dans l’abîme du sang et de la manipulation, devenus ses seules raisons de vivre. Arpentant des chemins obscurs, il acceptait des contrats sous couvert d’anonymat. Il devint le Sir Esanglant de la Forêt. Oncques n’osait plus en parcourir les sentiers et moultes furent les rumeurs villageoises. Or donc, le Sir avançait vers le crépuscule de son existence et il en portait forts ombrages. Il partit en quêste pour se garantir une jouvence pérenne. Sous les combes de la haute futaie, un signe lui fut envoyé. Il ne tergiversa guère. Au cou de l’animal cornu, il put se repaître. Il jouit alors de la jeunesse et d’ardente vitalité. Les années passant et trépassantes, Il garda par devers lui l’essence vitale de son infortunée victime, comme d’austres conservaient le vin. Vampire, ainsi fut le surnom qu’on lui donna. Le Sir se réjouissait quand des âmes égarées demandaient chemin, il pouvait à ce moment assouvir…

 

    Le héros au bouclier se retourna en entendant la porte claquer. Il découvrit alors l’homme au chapeau en appui sur sa cane avec derrière lui la folie et la discrétion. Il n’hésita alors point la moindre seconde. Il devait sauver les femmes du château.

 

    – ToyNoc réglons cela dans les règles de l’art. Un combat jusqu’à capitulation totale !

    – C’est SIR ToyNoc petit effronté. Tu n’es pas digne de mourir de mon épée et puis que vas-tu faire sans stèle ?

 

    Ce fut alors au tour de Jack de sourire. Un sourire à faire retourner les spectres des lieux dans leurs tombes. Il avait ce petit côté diabolique et calculateur. Il dégaina son épée sous l’œil rieur du maître des lieux. Il la pointa sur son adversaire à distance comme quand on lance un défi puis murmura quelques mots en dessinant quelques formes de la pointe de l’épée. Discrétion et Folie se retournèrent alors vers l’homme à cane.

 

    – Tu n’es pas le seul à connaitre des tours.

 

    L’épée n’était qu’illusion. Celle-ci disparut laissant place à une stèle. Une rune d’attaque. Le sir s’était fait avoir par la ruse du plus jeune. Ce dernier savait qu’il ne pourrait pas rivaliser dans un combat magique à la loyale. Le Sir était bien plus fort et expérimenté. Mais, Jack avait beaucoup appris en cherchant sa sœur. Il s’était entraîné et gardait toujours deux stèles. La première celle qu’il avait acheté en entrant à l’école. La seconde dont la longue garde faisait penser à celle d’une épée et pourtant la magie s’en échappait.

 

    – Par quel prosdige as-tu…

    – Un peu de silence !

 

    Deux dessins. Une statue remplaça l’homme. Le jeune homme tomba à genoux. Il était à bout d’énergie. Près de lui la femme s’était approchée et l’aida avec précaution à se redresser. Elle avait un regard rempli de culpabilité. Et pourtant elle n’était pas responsable. Elle s’était fait manipuler comme les deux jumelles.

 

    En repensant à cela, Jack lança un dernier sort. Un appel. Un lionceau sortit de sa baguette et fonça vers les cachots. Le lieu reculé atténuait l’emprise de l’homme pierre. Depuis que ce dernier ne pouvait plus se mouvoir à cause du sort principalement réservé pour solidifier les sols et objets, son contrôle sur le château semblait avoir disparu. Et, une fois les deux jeunes femmes les ayant rejoints, des présentations et explications s’imposèrent et la femme chat prit la parole.

 

    – Je tiens à vous remercier de votre aide, je suis Jane Doe, initiée-détective, je me charge principalement de disparitions d’enfants. Un jour, les parents des deux jeunes filles ici présentes sont venus me voir pour m’engager. J’ai remonté leurs traces jusqu’à ce château, mais je n’arrive pas à me souvenir de ce qui s’est passé après. Je sais juste que mon esprit ne contrôlait plus mon corps. Si vous permettez, je tiens à vous exprimer ma gratitude, je vous dois une faveur, n’hésitez pas si je peux faire quoique ce soit pour vous.

    – Ramenez simplement ces deux jeunes à leurs parents, ils doivent être bien malheureux et puis cet homme… Il faudrait expliquer à la police runique.

    – Je m’en occupe. Il va passer quelque temps à l’ombre. Merci encore

    – Merci Jack, de nous avoir sauvées.

 

    La jeune femme demanda aux jeunes filles de la tenir pendant qu’elle-même attrapait la statue. Elle sortit de sa poche un stylo et appuya après un sourire sur le bouton. Dans un bruit sourd, les quatre personnes disparurent.

 

    Ce n’est pas un peu simple le coup du stylo magique ?

 

    Tu vois un moyen plus cohérent pour faire voyager quatre personnes ?

 

    Pas faux on peut dire qu’elle le gardait en cas d’urgence, mais n’a pas pu l’utiliser à cause du contrôle mental ?

 

    Oui on va dire cela… Tu me laisses terminer ?

 

    Bien sûr… Même si je devine déjà la fin.

 

    La sœur prit la main de son frère. Un regard puis ils n’étaient plus. Le château retrouva son calme d’antan. Il n’avait plus de maître, mais bientôt un étranger se perdrait de nouveau dans ces contrées françaises reculées et prendrait à son tour le contrôle des lieux. Mais en attendant, suivons une dernière fois notre héros aux mille mystères.

 

    Le frère et la sœur venaient d’arriver devant l’entrée de la maison. Maison où la mère pleurait, n’ayant plus de nouvelles de son fils après avoir perdu son aînée. Un toc contre le bois. Des pas dans la maison. La porte s’ouvrit timidement. Puis la femme eut une expression indescriptible qui lui passa sur le visage. Ses enfants étaient de retour. Elle n’en revenait pas. Elle n’en croyait pas ses yeux. Elle les fit entrer avec précipitation et Jack referma la porte avant de rejoindre l’accolade familiale.

 

    Ainsi s’achève notre histoire. La famille était de nouveau au complet pour le plus grand plaisir de tous. Et leur aventure fit le tour du village, un conte pour enfants dont le chevalier blanc portait le nom de Jack le brave et dont le méchant n’était autre que le Sir ToyNoc…

 

    FIN, fermeture de rideaux.

 

    Le public se leva. Les jeunes avaient réussi à les faire retourner en enfance, le temps d’un spectacle. Qui aurait cru qu’un simple concours d’improvisation sur le thème des contes donnerait une histoire pareille ?

Les cerisiers

    Une annonce. Une phrase. Un mot. Un blocage. Le cerveau qui n’arrive pas. Le cerveau qui ne veut pas traduire. Texte en anglais. Mais, mots qui dépassent les barrières. Émotion dans le message. Réception en plein cœur. Un coup soulagé. Un coup apeuré. Un coup triste. Ne pas savoir comment réagir.

 

    Regard vers le chat. Attrapé. Il a compris. Il ne bouge pas. Il se laisse faire. Une douce musique berce les souvenirs. Descendre maintenant pour avertir. La sensation de ne pas être dans son corps. La sensation de ne pas être à sa place. Regard sans rien dire aux autres membres familles. Compréhension.

 

    Les mots sont parfois de trop. Mais les mots aident. Les mots filent. Les mots blessent. Les mots… Les mots c’est cela que je me souviens le mieux. La voix et les mots. Les expressions et les intonations. L’effort pour parler sur le même filtre. Un vocabulaire tellement riche. L’emploi juste. Plus que juste des mots. « Je jouis d’être ici » magnifiquement représentative de l’instant et de la personne. Des mots qui en cachent d’autres. « C’est marron ? » Un son incompris. Quiproquo de la partie. Marrant et rigolo sont maintenant de nouveau acquis. Cet esprit protecteur et famille. Ce côté respectueux et présent. Petite carte de Nouvel An.

 

    Des détails. Des mots. Parfois les choses les plus simples s’ancrent.

 

    Alors, après un mot doux. Un moment sans rappel. Un moment aux portes du sommeil. Le masque. Craque. Il. Fissure. Souvenirs. Remontés. Vite. Oublier. Ne pas penser. Si. Penser. Voix. Phrase. Écho. Les pensées tournent. Les images défilent. Les sons se mêlent. Les émotions tourbillonnent. Et les larmes, elles s’affolent. La respiration ne sait plus quoi faire. Elle tente de se calmer. Mais non laisser couler. Couler les larmes. Couler les émotions. Couler les sons. Couler les images. Couler les pensées. Les laisser s’évader.

 

    Douleur du moment présent. Bonheur du souvenir de l’instant passé. Ne pas savoir comment se positionner. Ne pas savoir comment on le ressent. Juste ressentir en revivant. Coïncidence des cerisiers. Fleurs qui éclosent au départ de l’être de lumière. Beauté de l’image. Ne plus pouvoir voir ses arbres de la même manière. Mais en même temps…

 

    Pressée de pouvoir les voir. Pressée de pouvoir partager. Un couvert manquant, mais l’esprit présent omniscient. Aller vers la famille. Famille. Un mot. Encore un mot. Sang ou non, elle dépasse les frontières. Elle est entière. Elle n’a pas de langue. Elle est unique pour chacun. Elle est là.

 

    S’envoler bientôt. Sentiments ancrés. S’envoler bientôt. Moitié de famille retrouvée.

 

    Futurs moments partagés.

    Dansons avec les fleurs de cerisiers.

N’omettez pas les détails

    L’orchestre jouait. Douce mélodie. Les instruments comme envoutés. Passion lui dansait. Agitant sa baguette. Il valsait, rythmant le général, le principal. Les idées s’envolaient. Elles s’exprimaient dans les notes. Dans les couleurs des sons. Elles se combinaient pour reformer le tableau.

 

    Sur scène, ce tableau se mouvait. Les ombres dansaient en accord avec les instruments. Une chorégraphie harmonieuse qui s’ancrait dans un décor vaste. Un ensemble englobant. Une explication générique. Des mouvements de tous les jours… en apparence.

 

    En entrant dans le lieu, le tableau n’est pas des plus original. Plutôt un peu banal. L’envie de passer à côté. Ne pas y prêter attention. Mais au moment de rebrousser chemin, une note. Une simple note. Une se distingue. Un pas grand-chose. Un petit rien. Cela suffit…

 

    Un pas devant l’autre. Se rapprocher comme attiré. Un pas après l’autre. S’avancer comme hypnotisé. Une nouvelle teinte de couleur se démarque. Elle s’élève comme un ruban. L’attraper du regard. La suivre jusque dans l’orchestre. En chercher l’origine. Yeux posés sur les musiciens. Ou plutôt sur les instruments.

 

    Des gravures. Des dorures. Des paysages se mouvant sur le bois. Des animaux dansant sur le métal. Des sons exprimant des émotions. Les émotions s’expirant librement au milieu des idées. Les idées comme des notes qui s’ajoutent à la danse.

 

    Un œil sur la scène. Sur les silhouettes. Sur les ombres. Les tenues. Les étoiles. Les nuages. Toutes ces choses que l’on oublie de voir. Les variations infimes de la musique. Les petites pertes d’équilibre des danseurs. Les costumes. Les masques. Les regards. Des petits changements qu’on ne pense pas à voir.

 

    Les sentiments cachés. L’expression de la liberté. Loin de la banalité. Ne pas chercher à se conformer. S’avancer et entrer dans la danse. Monter sur la scène. Laisser de côté le masque habituel. Laisser l’Unique s’exprimer dans les mouvements, dans l’apparence, dans les mots. Le laisser danser sur la partition.

 

    De Passion à l’écrivain, les notes deviennent des mots.

    Sur la partition d’une page blanche, les idées s’agencent.

    La couleur des sentiments, une mélodie hors du tableau.

    Un texte n’est alors qu’une harmonie de détails qui dansent.

 

Playlist : « Combat »

    Musique entraînante. Tu la connaissais par cœur. Même playlist encore et toujours. Toujours le même rythme. Mais aujourd’hui était légèrement différent. Face à lui, tu t’étais dressée. Les dernières notes de l’échauffement se faisaient entendre. Tu reprenais ton souffle. Tu resserras tes gants. Tout en le fixant. En attendant le top départ. Ce moment où tout basculera. Celui où tu te lâcheras vraiment.

 

    Fin de la mélodie. Tu entends la musique diminuer petit à petit. Les secondes devinrent alors des heures. Tu retenais ton souffle. Regard sur l’objectif. Tu ne pouvais pas baisser les bras. La garde haute. Les yeux rivés sur lui. Tes sens aux aguets. Oreilles dressées.

 

    Changement de musique. Première note. Premier coup. Les suivants ne tardèrent pas. Il ne bougeait pas. Il ne flanchait point. La mélodie des souvenirs te prit alors. Tout en continuant. Tout en bougeant. Sans réfléchir. Ton esprit lui décida de partir. De se perdre dans le fil de ta pensée. Pensée tournée vers le passé.

 

    Chanson réveillant la mémoire. Des paroles. Des mots entendus trop de fois. Des actions marquantes. Une voix qui résonnait. Toujours et encore les mêmes choses. Toujours et encore les mêmes situations. Toujours et encore les mêmes reproches. Tu n’avais qu’une envie : la faire taire.

 

    Stopper cette musique. Tu n’en pouvais plus. Tu n’en voulais plus. Simplement un peu de liberté. Ne plus avoir cette chaîne dans le cœur et dans la tête. Chaîne aidant le mur à tenir en sa place souveraine. Mais ce dernier se fissurait doucement. Se brisant de lui-même en l’instant présent. Ton regard venait de changer. Il n’était plus neutre.

 

    La mélodie venait de changer. Il y avait comme une étincelle. On pouvait voir au travers du mur. Tes coups toujours aussi précis étaient maintenant plus appuyés. La force comme décuplée. Tu sentais le contre coup au travers de la protection. Un choc répété.

 

    Rythme calé sur la musique. Playlist sans fin. Tu continuais. La voix en toi s’élevait. Dans ta tête, elle criait. Tu avais envie de lui hurler de se taire. Alors tu frappais. Chaque choc plus important que le précédent. Tu avais mal aux mains. Au cœur. Mais tu ne t’avouais pas vaincue. Tu enchaînais.

 

    Les chansons s’enchaînèrent. Face à toi, il était stoïque. Pas un signe de faiblesse. Toi, petite boule de nerfs à vifs, tu t’essoufflais. Mais tu refusais d’observer les choses en face. Les souvenirs. Ces souvenirs se ressassaient jour après jour. Encore et toujours. Même dans tes rêves, ils venaient te hanter.

 

    La musique suivante. Adversaire se métamorphosant. Objet de cauchemar face à toi. Mais tu ne te figeas pas. Tu ne flanchas pas. Tu t’armas. Retirant tes gants. Mains nues face à lui. Maintenant prête. Ne retenant plus en rien tes coups. Silhouette attaquée restant de marbre. Illusion rigolant presque de l’effet produit. Soudain coup final.

 

    Note finale. Coup fatal. Loupant sa destination. S’écrasant de toute sa force contre le mur. Sac de frappes loupé de peu. Aveuglée par le désir d’oublier. Oublier quoi ? Je ne m’en rappelais plus. Pensées tournées vers la réalité. Masque explosé en écho aux phalanges contre le mur. Assise sur le sol. Une main tenant l’autre tremblante. Couleur changeante.

 

    Musique plus douce passante. Couleur changeante. Des larmes glissant, tombant, s’écrasant sur le parquet. Yeux au plafond. Encore un combat contre les pensées et cauchemars de perdu. Un membre sur la touche. Bougeant avec difficulté. Victoire par abandon. Contre un sac de frappes, tu le savais. Tu ne pouvais pas l’emporter. Mais contre toi-même et tes barrières, le chemin était amorcé.

 

    Note s’enchaînant sur la partition. La route sera encore longue. Pour l’heure, il te fallait te reposer. Soigner le corps et le cœur blessés. Le calme après la tempête. Un jour tu arriveras au bout de ce sentier. Ce dernier ne sera peut-être pas une promenade de santé. Des obstacles aussi imprévisibles les uns que les autres. Mais tu avais quelque chose en toi en plus de ta détermination.

 

    Une chanson comme un nouveau souffle. Un petit truc abstrait qui t’aidera à avancer. Une notion à ne pas perdre. Une chose aidant à croire de nouveau. Un peu de confiance en soi. Mais surtout l’espoir. Cette force qui pousse à avancer. Vis. Chante. Danse. Remets-toi doucement de tes blessures. Apprends de celles-ci. Ne fais plus de mal à ton corps pour oublier la douleur du cœur. Prends soin de toi. Et. Un jour…

 

    Musique de l’espoir. Tu verras la lumière sur ton chemin vers la victoire contre les démons passés.

 

Une balade

    Une balade dans la nature. Un instant de joie. Une sensation de liberté. Un rayon de soleil. Une randonnée un peu fastidieuse par moment. Mais rien de bien méchant. Chacun de mes pas me rapprochant un peu plus du sommet. Les petites racines ne m’arrêtaient pas. Je les passais sans soucis. J’étais heureuse. Je respirais. Dans cette nature, qui me protégeait.

 

    Soudain, une pente plus abrupte. Une difficulté supplémentaire. Plus grande que les autres. La nature me jouait des tours. Cependant, l’envie d’avancer était plus forte. Plus importante. Et redoublant d’efforts je le franchis. Je m’écorchais un peu le bras au passage. Je n’y fis pas attention. J’oubliais ma propre douleur pour avancer. J’étais toujours contente. Le soleil brillait toujours. Insouciante. Naïve. Je ne vis pas les nuages commencer à le couvrir. Je ne remarquais pas qu’autour de moi les ombres commençaient à paraître.

 

    Seule sur le chemin. Un peu de courage. De la patience. De la volonté. J’avançais toujours. Surmontant les obstacles. La pente de plus en plus raide. Les pauses de plus en plus rares. Des étapes de plus en plus difficiles à franchir. Une blessure de plus venant s’ajouter après chacune.

 

    La balade qui devait m’apporter du bonheur commençait à me blesser. Je ne m’en étais pas rendu compte tout de suite. Mais lorsque j’arrivais devant un énième mur. La pluie éclata. Je me retrouvais perdue. Devais-je avancer ? Franchir ce nouvel obstacle au risque de m’abîmer encore ? La patience commençait à manquer. La douleur de chaque égratignure non soignée se faisait ressentir. La détermination, elle, s’était cachée.

 

    Au pied du mur. Je savais que peu de solutions étaient là. Je n’avais pas la force de le franchir. Je ne pouvais plus. Seule, mes efforts seraient vains. Je pouvais sinon attendre que cesse la pluie. Mais cela ne ferait que retarder l’inévitable. Ce mur était infranchissable pour mon corps blessé.

 

    Déçue. Résignée. J’estimai qu’il était préférable de rentrer. Soigner mes plaies. La descente sera surement difficile. Mais rester devant ce mur n’était plus possible. Alors, je tournais les talons.

 

    Triste. Énervée. Je m’en voulais de ne pas avoir eu la force de continuer. Derrière de nouvelles épreuves m’attendaient. Aujourd’hui, je n’avais plus la volonté de les affronter.

 

    Soulagée. Nostalgique. Ce trajet était tout de même plaisant. Des souvenirs resteraient gravés. Pourquoi oublier une balade joyeuse pour un petit bout de chemin couvert d’épines ?

 

    Mitigée. Mais optimiste. Le chemin qui me ramènerait chez moi était aussi couvert d’obstacles. Moins grands. Inévitables. Mais je devais aller de l’avant. Vers de nouveaux paysages.

 

    La prochaine balade sera peut-être plus longue

    Mais aujourd’hui le tonnerre gronde.

    Il vaut mieux rentrer s’abriter

    Attendre une nouvelle opportunité.

La douleur d’une mère

    (Point de vue de Max, la mère)

 

    La journée d’anniversaire terminée, je commençais à ranger la maison. Les emballages de cadeaux trainaient sur le sol. Les assiettes étaient toujours sur la table. Le reflet avait voulu lancer un sort pour tout nettoyer, mais j’avais refusé vivement. Tout ne doit pas être fait avec de la magie. Il ne fallait pas dépendre d’elle.

 

    Je souriais en repensant à cette journée. Ce fut riche en émotions. MacKayla venait d’avoir six ans. Six ans déjà. Comme le temps passait vite. Je me rappelais de la naissance comme si c’était hier. J’étais encore émue. Bientôt, elle allait partir de la maison pour ses études. J’avais un peu peur. C’était mon enfant. Je devais la protéger.

 

    En parlant de la protéger, il commençait à se faire tard. J’allais passer une tête par la porte d’entrée. Elle jouait avec les deux louveteaux devenus grands. Ils s’entendaient tellement bien tous les trois. Et puis, ils étaient toujours là pour elle. Surtout Laurel qui la suivait partout. Cela était vraiment mignon. Et rassurant aussi pour mon cœur de maman.

 

    Lorsque je lui demandais de rentrer, elle demanda du temps supplémentaire. Je ne pouvais pas lui refuser. Elle avait des yeux auxquels je ne pouvais difficilement résister. Je lui laissai alors quelques minutes. Le temps de finir le rangement. Je rentrais en souriant.

 

    Je m’activais pour finir de tout ranger. Il ne restait pas grand-chose. Je criais un peu fort que j’avais fini. Les loups passèrent rapidement la tête par la porte. Ils entrèrent. Je m’attendais à voir ma fille les suivre. Mais, personne. Mon cœur loupa un battement.

 

    J’allai dehors. Personne. Je l’appelais. Rien.

 

    – Laurel, Hardi, vite, retrouvons là !

 

    Les deux loups sortirent en trombe de la maison en fonçant dans la forêt. Ils étaient suivis de Rouky et Rox. Berger allemand et chat, prêts, eux aussi, à partir à la recherche de l’enfant. Tous ensemble, nous la retrouverons, même si je devais y laisser ma peau. Je courrais derrière le chat. Une transformation en écureuil serait risquée.

 

    J’entendis un cri. Puis un hurlement. Mon sang ne fit qu’un tour. Je ne réfléchissais plus. Je ne me contrôlais plus. Ce cri venait de mon enfant. Je devais la retrouver. Je fonçais vers l’origine. Jusqu’à en perdre haleine. Jusqu’à en perdre mon souffle. Elle comptait plus que tout à mes yeux. Je ne pouvais pas l’abandonner.

 

    Je slalomais entre les arbres. Je vis comme une bataille devant moi. Mais je n’y fis pas vraiment attention. Mon regard se porta sur le corps au sol. MacKayla. Elle saignait. Sa main posée sur un bébé renard. Mon regard changea. Il se tourna vers le coupable. Celui-ci se battait avec Laurel. Je sortis ma stèle. Le sort fusa. Rapide. Simple. Efficace. La créature fut projetée en arrière. Un autre sort. La voici assommée.

 

    Je dus me retenir pour ne pas en lancer un autre. Mais une pensée revint à l’esprit. MacKayla. J’attrapais la petite fille dans mes bras. Ne me sentant pas de laisser le renardeau, je confie aux animaux la mission de le ramener au chalet. Je courais. Je me repérais à l’instinct connaissant bien la forêt avec les années.

 

    Arrivée devant le chalet, je remarquais que la peau de l’enfant était chaude. Elle suait un peu. Elle semblait torturée dans son sommeil. Non. Ne me dites pas que. Non… Partagée entre la tristesse et la douleur, je devais rester concentrée. Elle perdait beaucoup de sang, mais ses plaies ne semblaient pas trop profondes. Je me dirigeai alors vers le cabanon et non le chalet. Je la déposais sur des couvertures. Un sort de soin sur les plaies. Mais cela ne marcha pas sur l’épaule. Je courus vers la maison.

 

    Placard de l’entrée. Une petite décoction en cas d’extrême urgence. Un simple mélange contre les blessures des êtres de pleine lune. Je l’apporte et l’étale sur la blessure. Celle-ci se résorbe doucement. Cela voulait donc dire que… non Max… Concentre-toi…

 

    Des bandages autour des plaies. La magie médicale n’était vraiment pas mon fort. Quelques runes pour vider l’abri au maximum au plus vite. Puis se retirer. Fermer la porte. La sceller. S’assoir. Pleurer. Les nerfs lâchaient. Je n’étais plus capable de garder le masque. J’espérais qu’elle s’en sorte. Je ne pouvais rien faire pour elle. Je ne pouvais rien faire pour l’aider. Je ne pouvais même pas entrer pour être là. Je devais être là pour la suite.

 

    J’espérais sincèrement que les livres se trompent et qu’elle survive. J’espérais que tout ceci ne soit qu’un rêve. J’espérais assise contre la cabane de bois. J’allais peut-être perdre ma petite fille ce soir. Je n’avais pas su la protéger. Je n’avais pas su être là. J’aurais dû…

 

    Un cri me sortit de mes pensées. Je devais me retenir de regarder. Un nouveau cri. Puis un autre. Puis le silence. Un grognement. Des hurlements. Des bruits. Contre la porte. Contre les murs. La peur me prit au fond de moi. Un nouveau sort sur la cabane pour l’aider à résister. Avant de rentrer.

 

    Le renardeau avait lui aussi besoin de moi. Et assise devant la cabane à attendre je n’étais pas des plus utiles. Je soignais le petit que l’un mes loups avait déposé sur un coussin dans le salon. Il allait s’en sortir avec une belle cicatrice, mais le petit était un battant. Comme MacKayla. L’espoir était là.

 

    Je ne dormis pas de la nuit. J’attendais que les bruits dans la cabane cessent. J’attendais pour pouvoir rentrer. J’attendais les premiers rayons du soleil. J’attendais la disparition de la lune. J’attendais que ma petite fille revienne.

 

    Soudain, plus un son ne sortit de la cabane. Plus rien. Plus un mouvement. Je m’approchais discrètement de la fenêtre pour vouloir le petit corps allongé sur le sol… nu. Je m’empressais de baisser les protections pour envelopper ma fille dans mon pull. Je la raccompagnais à l’intérieur. Je la déposais dans son lit. Je lui enfilais des vêtements amples. Puis je fis de nouveau ses bandages au niveau du cou, épaule et dos. La marque de griffure était bien profonde. Elle risquerait de rester plusieurs années.

 

    Je fis des allers-retours pour aller lui chercher un linge. Essuyant son front. Lui nettoyant le visage. Les animaux venaient eux aussi. Ils étaient inquiets tout comme moi. Je priais pour que MacKayla se réveille. Pour qu’elle ouvre un œil. Qu’elle fasse un mouvement. Un signe de vie supplémentaire à la respiration faible.

 

    Elle finit par se réveiller trois jours plus tard. Je n’avais presque pas dormi. Le reflet, mon frère était arrivé la veille pour m’aider et prendre le relais. Mais sachant ma fille mal en point, je ne trouvais pas le sommeil. Et elle s’était réveillée. Doucement, douloureusement, avec une tentative de sourire, mais elle était là. En vie. Je promis alors de tout faire pour l’aider…

Petite Plume (partie 2)

    Tu hésites. Tu n’es pas rassurée. Tu ne sais pas si cela s’est vraiment bien passé hier. Tu doutes de toi. Tu as envie de reculer. Tu ne te sens pas prête. Et pourtant il te faut bientôt y aller. Tu n’as plus le temps de penser à reculer. Tu t’avances alors. Tu tentes de te convaincre que tu peux le faire. Ce n’est que ton deuxième vrai rêve. Tu peux le faire.

 

    Un messager arrive. L’heure a sonné. La main sur la poignée de la porte de la salle des livres, tu hésites de nouveau. Mais tu ne peux pas laisser cette personne sans rêve. Tu la connais à peine mais malgré cela tu te sens proche d’elle. Tu ne connais pas son âge mais tu l’imagines proche du tien. Tu ne sais même pas son nom. Tu espères que ce rêve te révélera de nouvelles choses.

 

    Page tournée. Une musique s’en échappe. Toi qui étudies les humains depuis un temps, tu t’en souviens. Tu te laisses bercer l’espace d’un temps. Tu t’inspires. Mais par-dessus de la musique, des moqueries se font entendre comme émanant de derrière la guitare dessinée. Tu as une idée. Un style différent. Une inspiration. Tu te lances.

 

Rêve second : « Tu n’es pas seule »

Éléments : Guitare, Une chanson, Moqueries

 

    Grande pièce sombre. Une lumière. Tu es en dessous. Elle t’éclaire et en même temps assombrit tout autour de toi. Cône lumineux suivant tes déplacements. Le silence majoritairement présent. Tu tournes, tu vires. Sans savoir où aller. Sans savoir où tu es. Tu as l’impression que cette pièce est sans fin. Quand soudain…

 

    Une note. Puis une autre. Elles se suivent. Tu en cherches l’origine. Tu connais cette mélodie. Elle t’inspire. Tu sens que tes pas se calent sur la partition. Comme si tu marchais dessus. Comme si chaque pas que tu fais sur le sol modifiait le son. Tu crées ta chanson. Elle se forme petit à petit. Instrument après instrument. Le rythme s’intensifie doucement.

 

    Mouvement. Envie de bouger. Musique de fond. Tu ne sais pas ce que tu fais. Ton corps se meut de lui-même. Comme transporter. Tu n’as plus la maîtrise sur ton propre corps. Tes pas s’enchaînent au rythme des notes. Tu oublies le monde qui t’entoure. Tu oublies tout. Tu es libre. Libre d’être toi et de t’exprimer. Seule sous ta lumière.

 

    Ta tenue change au fur et à mesure que tu te détends. De couleurs, tu t’habilles. Des motifs apparaissant et disparaissant timidement. Comme si tes vêtements jouaient avec la musique. Cela te donne envie de faire de même. Te laisser transporter par les notes. Tu fermes alors les yeux, te laissant aller. Lâchant prise, totalement.

 

    Tu danses maintenant de toi-même sans y penser. Tes membres t’appartiennent de nouveau mais tu ne t’en rends pas compte. Tu bouges. Tu profites de cet instant hors du temps. Te demandant seulement quand le rêve s’arrêtera. Tu n’as pas envie qu’il s’arrête. Tu voudrais rester dans cette bulle de bonheur. Encore quelques instants, quelques minutes, juste une seconde.

 

    Toi qui te sentais seule avec ta musique tu ne l’es plus. Elle t’accompagne et te guide. Elle est là. Tu l’imagines près de toi. Comme personnalisé. Tu ne sais pas à quoi elle pourrait ressembler. Tu te dis qu’elle danserait sûrement sans regarder les autres. Juste pour le plaisir. Juste pour profiter de l’instant et d’un moment de complicité. Tu ouvres alors les yeux.

 

    Les notes autour de toi. Tu peux les voir. Elles sont là, présentes, dansant dans les airs. Des rondes et des blanches. Des noires et des croches. Le son augmente comme t’entourant de plus en plus. Comme ces notes qui bougent en rythme. Elles se rassemblent et s’assemblent. Elles s’unissent et tourbillonnent encore et encore. Un flash, elles s’écartent.

 

    Une figure. Une silhouette. Homme ou femme. Tu ne sais pas. Tu ne le devines pas. Tu ne veux pas te poser la question. Appelons-la, Max, prénom mixte. Un M comme musique, ce prénom te plait bien. Il sonne bien. Max portant des habits en accord avec la musique. Guitares se mêlant aux partitions en motif sur sa chemise. Tu lui souris.

 

    La chanson se termine. Une nouvelle reprend le relais. Max tu attrapes alors la main. Tu ne sais pas danser, tu hésites. Son sourire t’empêchant de refuser. Tu acceptes. Tu te dis qu’il n’est jamais trop tard pour apprendre. Alors, tu lui laisses une chanson d’essai. Mais tu ne sais pas guider, tu ne sais pas si Max le sait. Tes questions informulées trouvant rapidement une réponse quand l’individu t’attrape la main et te fait tourner.

 

    Tes chaussures s’illuminent. Tu sembles connaitre les pas de toi-même. Un vague souvenir. Un tour dans un sens puis dans un autre. Un top-là et un nouveau tour. Des bras qui se nouent. Un pas sur le côté. Tes pieds ont attrapé le rythme. Tu n’as plus qu’à profiter. Doucement tu te prends au jeu. Tu enchaînes les passes guidées par la Musique.

 

    Tu te surprends à aimer danser, toi pour qui la danse semblait inatteignable. Deux pieds gauches, un sens approximatif du rythme et te voici dans les bras de Max. Tu es guidée. Tu manques parfois de tomber, de justesse rattrapée. Tu ne veux plus que la musique s’arrête. Tu ne penses plus à tes problèmes seuls l’amusement compte. Tu souris. Tu prends du plaisir. Tu t’éclates. Tu t’es plus seule.

 

    Vous êtes deux. Deux personnes perdues à danser sous les feux des projecteurs sans savoir où vous mèneront cette danse. Mais personne n’y pense. L’important étant l’instant. Savoir si face à toi une femme, ou un homme, le genre importait peu. Pour toi c’était Max tout simplement. Max à la chemise musicale. Tu as l’impression de l’avoir déjà vu. Sûrement un hasard.

 

    Tes réflexions coupées par le son qui diminue petit à petit. Ton sourire fane alors que tu bascules dans un penché. Intérieurement tu te demandes si c’était ta dernière danse tu n’as pas envie de retourner à tes pensées que tu veux simplement oublier en bougeant de nouveau dans les bras de ton meneur.

 

    Reprise rock’n’roll plus rapide que la précédente comme un air de défi. Un sourire malicieux sur les lèvres de Max qui te redresse. Ton sourire suit le mouvement. Un petit tour sur toi-même. Changement de tenue. Une chemise assortie. Tu rigoles alors que la danse reprend.

 

    Tu joues. Vous jouez. Deux enfants jouant sur scène. Tu retiens un nouveau rire lorsque la main de Max loupe la tienne t’obligeant à trouver une petite pirouette pour revenir dans la danse. Tu es surprise par toi-même pas autant que la figure qui tourne à son tour. Tu la guides l’espace d’un refrain. Une drôle de sensation. Mais cela te plait d’échanger les rôles un temps. Tout semble si naturel pour toi. Tu as trouvé ton élément. Un moyen de te détendre de ne penser à rien et juste d’être toi.

 

    De la bonne musique. De la bonne humeur. Pas de jugement. Des sourires. Une petite bulle de bonheur. La chanson arrive bientôt à sa fin. Vous accélérez en rythme. Vous tentez des choses un peu plus acrobatiques. Vous jouez avec l’espace. La scène vous appartient. Jusqu’à la dernière minute. Le dernier refrain.

 

    La lumière change. Plus lumineuse. S’accordant à ton humeur. Tu souris de plus belle. Tu es un peu fatiguée mais tu ne lâches rien. Tu as envie d’aller jusqu’au bout. Tu sais que tu n’arriveras pas à enchainer une autre danse mais tu ne veux pas t’arrêter maintenant. Alors, allons-y jusqu’au bout. Jusqu’à la dernière seconde.

 

    Max semble être d’accord avec toi. Son regard toujours aussi pétillant alors que son corps semble lui dire stop. Mais il reste encore quelques secondes. Vous profitez jusqu’au bout. Tu sens la fin arriver. Tu ne penses pas que vous aurez le temps nécessaire pour le penché final. Et pourtant. La figure avait plus d’un tour dans son chapeau qui venait d’apparaître sur sa tête. Une fin improvisée dans les bras de Max. Un sourire.

 

    Fin de la musique. Lumière éclairant le reste de la pièce. Public debout. Applaudissant. Tu te sens gênée et en même temps fière. Tu peux l’être. Une ovation. Un final magique. Max te met son chapeau après t’avoir reposé sur le sol. Tu fais une petite révérence avant de sauter dans les bras de la silhouette.

 

    Tandis que le rideau se ferme, la musique reprend. Vous êtes fatigués mais une simple danse cela ne peut pas se refuser. Le public put alors vous voir reprendre. Deux personnes à bout de souffle. Corps portés par la musique. Pieds guidés par les notes. Rien ne semble pouvoir les arrêter. Certains les imaginant danser encore et encore même une fois le tissu rouge refermé.

 

Réveil.

 

 

 

Un réveil douloureux

    Tu te réveilles doucement. La douleur. Elle t’irradie. Cou. Épaule. Dos. Pourtant les plaies semblent avoir été soignées. Tu le remarques en voulant toucher ta peau. Un bandage t’en empêchant. Tes yeux ouverts. Tu vois, un plafond à la place de la forêt. Quelque chose de familier. Mais ta tête te brûle. Tu n’arrives pas à réfléchir.

 

    La remise. C’est le nom de lieu que tu cherches sans le trouver. Tu te redresses. Les mains entourant ta tête. Tu cris de douleur. Celle-ci est tellement intense. Tu la sens se propager. Tu la sens au fond de toi. Tu la ressens. Elle ne diminue pas. Elle ne te laisse pas de répit. Elle est violente.

 

    L’espace d’un instant, tu te sens partir. Une voix resonne en toi. « Non-restes réveillée. » Tu luttes pour la suivre. Mais, elle te prend de plus en plus. Tu sens comme une force remonter dans ta tête et dans chacune des cellules qui la composent. Tu fermes les yeux. Tes mains s’agrippent dans tes cheveux.

 

    Puis elle s’étend. Elle vient gagner le bras droit avant le gauche. Ta notion du temps est instable. Cela semble durer à la fois des heures et en même temps c’est tellement rapide. Tu ne sais pas si ton corps tiendra. Tes bras te brûlent. Ta peau te brûle. Tu as comme envie de la retirer. Assise en boule sur le lit de fortune, tu te balances.

 

    L’expansion de la douleur continue. Elle part à la conquête du reste de ton corps. Elle descend sur ton tronc. Tu arraches ton T-shirt avec une force qui ne t’appartient pas. Tu envoies valser les bandages. Tu te retrouves sur le sol. Sans savoir comment. Ta tête tourne. Tu n’as plus vraiment la notion de l’espace.

 

    Bientôt, même les jambes sont touchées par le fléau. Ton pantalon t’est alors insupportable. Tu le retires rapidement. Tu te mets à nue. Et même ainsi, la chaleur en toi ne diminue pas. Elle s’intensifie. Encore et encore. Elle joue avec la douleur. Elle s’associe avec elle. Tu ne sais plus qui précède l’autre. Tout ton corps te brûle. Tu cries encore et encore.

 

    La douleur entre dans ta chair. Elle se propage dans tes muscles. En tous, en même temps. Jusque dans tes os, tu la sens. La douleur résonne dans chaque parcelle de ton être. Tu as envie de lui crier de partir, mais tu n’y arrives plus. Tout ceci est tellement intense que ta voix elle-même s’en est allée.

 

    Tu sens tes os se tordre. Tu les sens craquer. Tu les sens changer. Tu sens chaque changement dans ton corps et ta posture. Tu te courbes. À quatre pattes sur le sol, tu ne contrôles plus rien. Tu n’es maitre de rien. Tes ongles poussent avec douleur et violence. Tes mains et pieds se transforment en même temps que les larmes touchent le sol. Et ton squelette n’est pas le seul touché.

 

    Sur ta peau, tu sens comme de milliers de piqures. Tu sens que quelque chose change. Ta peau te brûle. Elle est comme attaquée de l’intérieur. Comme si quelque chose allait en sortir. Les poils poussent de partout. Chacun est accompagné d’une douleur. Les larmes de douleur remplacent les cris.

 

    Autour, tout est flou. Heureusement dans l’abri, la luminosité est faible. Seule celle de la lune est présente. La fenêtre comme seule source de lumière. Les yeux déjà sensibles à la faible lueur. Tu regardes le sol. Ta vue change. Tes pupilles se dilatent. Tu les sens. Tu sens chaque changement infime de ton être. Tu les sens.

 

    Comme tu sens toutes les odeurs autour de toi. Elles se mélangent. Elles dansent sans aucune harmonie. Elles se bousculent dans ton nez. Elles te font mal à la tête. Tu n’arrives pas à les différencier. Les stimuli sont trop importants, trop nombreux. Tu n’arrives point te concentrer sur un seul. Mais l’odorat et la vue ne sont pas les seuls impactés…

 

    Une cacophonie se fait entendre. Malgré tes mains sur tes oreilles, tu n’arrives pas à faire diminuer le volume. Tout est de plus en plus fort. Tu entends des pas. Tu entends le vent. Tu entends les grincements du bois. Tu entends des sons que tu n’arrives pas à nommer. Cela semble sans aucune logique.

 

    Dans ta tête, tu luttes. Tu ne sais contre quoi. Tu tentes de garder le contrôle. Il est trop tard. Tu appelles ta maman. Seul un son difforme sort de ton gosier. Tu sens la douleur partout en toi. Tu la sens en toutes choses. Tu la ressens entièrement. Elle est tellement forte. Plus forte que toi sur l’instant. Tu t’abandonnes. Tu hurles…

 

    Tu n’es plus. Il est maitre.

 

    Il hurle. Il prend le contrôle. Il est maitre à présent. Il ravage tout. Il veut partir. Liberté. Porte fermée. Il s’énerve. Il détruit tout. Évasion. Porte bloquée. Il use de ses griffes. Il use de sa force. Rien. La porte résiste. Il grogne. Il s’enrage.

 

    Une odeur. Vision rouge.

    Courir. Tourner.

    Attaquer. Louper.

    Sortir. Bloqué.