Tu tournes. Tu vires. Tel un animal en cage, tu ne sais quoi faire, quoi dire. Tu t’auto-enchaînes. Tu te bloques consciemment. Tu fabriques ta propre prison. Tu te mets tes propres murs. Tu enchaînes ton propre cœur. Tu fais tout cela par peur.
Tu as peur d’en dire trop. Tu as peur des mots qui s’enchaînent sans vraiment les contrôler. Tu as peur que certaines de tes idées puissent être mal interprétées. Tu ne sais quel mot employé. Est-ce le bon ? Dans le bon contexte ? Tu ne sais plus. Tu hésites. Tu ne dis alors plus rien…
Tu as peur d’en faire trop. Tu as peur de tes actions spontanées que tu peux difficilement empêcher. Tu as peur que certaines mettent mal à l’aise. Tu ne sais quoi faire. Est-ce que cela est correct ? Est-ce que tu as le droit ? Tu te poses trop de questions. La gêne. La Peur…
Toi qui dansais sur la scène de ta vie tu sens alors une chose en toi. Tu sens ce quelque chose qui se dégage d’un coup. Ce nuage qui s’extirpe de ton corps. Cette masse qui se matérialise. Elle rigole. Encore et encore. Elle rigole. Tu la regardes sans comprendre.
Elle prend place sur la scène. Elle danse sur la scène. Elle prend tout l’espace de la scène. Et toi, toi, tu es enchaînée au sol. Tu as du mal à te relever. De ta bouche, aucun sol ne sort. Tu es là sans être là. Et la Peur, elle, danse. Elle s’élance. Elle t’ignore. Elle t’oublie…
Tu ne peux la laisser prendre ta place. Tu ne peux la laisser gagner. Tu te lèves tant bien que mal. Tu te redresses malgré les chaines à tes poignets. Tu fais un pas. Puis un autre. Tu manques de tomber. Elle rigole, encore. Tu as le regard déterminé.
La musique t’encourage à sa façon. Tu la sens raisonner en toi. Tu la ressens. Tu la vis. Tu tends alors la main à l’être de noir face à toi. D’humeur joueuse, l’individu l’attrape et la valse commence. Les chaines volant autour de vous. Le sourire s’agrandissant pour l’un et diminuant pour l’autre.
Un retournement inattendu. L’humain dansant avec la peur. La guidant dans sa propre danse, ses propres pas, sa propre mélodie. Luttant pour briser ses liens. Pour être libre. Mais aussi accepter ses faiblesses et maladresses. Une danse, mais pas que…
Une transformation. La peur change au fur et à mesure des notes. Elle se colore de ton aura. Elle s’éclaircit. Elle sourit. Non pour se moquer. Un sourire pour partager. Elle devient une force. Une alliée. Et même si parfois elle fait apparaître ses chaines. Sous son masque sombre, la douceur se révèle.
Tes chaines, une à une s’envolent avant de disparaître. La parole te revient petit à petit. Tes pas plus légers. Ton cœur allégé. Tu souris. Tu dis merci. Tu grandis. Ta partenaire esquisse une révérence avant de reprendre sa place au fond de toi. Tu rayonnes de nouveau.
Même si tu sais que les peurs sont toujours là, tu sais qu’elles ne sont pas toutes là pour te nuire. Une maladresse ne devrait pas te faire paniquer. Et si par malheur, tu en commets une. Un petit pas de danse, un changement de musique. Tu réussiras à te relever.