Jour 11 : Neige

    Tout est calme. Tout est doux. Tu marches tranquillement. Tu te promènes dans les rues. Tu te perds rapidement. Tu aimes découvrir. Tu aimes les surprises. Tu te trompes alors volontairement. Tu prends un chemin que tu ne connais pas. Tu avances à l’instinct.

 

    Un coup à droite. Un coup à gauche. Tu t’éloignes de la ville. Tu arrives dans un grand parc. Ou plutôt une forêt. Tu t’enfonces doucement dans son cœur. Tu suis les fleurs. Comme si elles t’indiquaient la route. Comme si elles voulaient que tu voies quelque chose.

 

    Au fur et à mesure, les paysages changent autour de toi. Les arbres bougent et se meuvent. Les plantes semblent chanter une mélodie. Du printemps à l’été, le soleil se fait plus fort. Les couleurs explosent autour de toi. Tu es submergée. Tu les vois t’entourer de tous les côtés. Un arc-en-ciel sur le sol. Un tourbillon multicolore dans les yeux. Tu hésites à t’arrêter, mais la curiosité en toi veut découvrir la suite.

 

    Les couleurs s’adoucissent. L’automne fait son apparition. Les feuilles se décrochent des arbres. Elles dansent. Elles valsent. Elles forment des personnages qui partagent un moment unique. Tu te surprends à les regarder. Tu te surprends à les envier. Tu as envie de les rejoindre. Juste quelques tours sous cette pluie de feuilles si douce. Mais tu es happée par la suite. Curiosité toujours de la partie.

 

    La teinte de la forêt change de nouveau. Les couleurs se font plus subtiles sous cette épaisse couche de blanc. Quelques touches de bleus. Quelques pétales qui résistent. Tu vois d’un coup les flocons rouler. Ils se rejoignent. Ils se fusionnent. Ils brillent. Ils tourbillonnent. Ils te fascinent. Tu les regardes faire. Tu les observes. Tu les regardes changer. Et devant bientôt, un être apparaît.

 

    Un chapeau arrivé de nulle part se pose délicatement sur la tête de l’individu irréel. Tu l’observes. Il te salue. Tu optes pour la légère courbette. Un rire amusé et timide derrière toi. Tu te retournes. Un être de fleurs, un autre de couleurs et le dernier de feuille. Tu ne saurais les genres. Ils t’entourent. Ils te sourient. Ils s’approchent.

 

    Tu te réveilles. Tu te demandes si cela était réel. À la vue des dessins sur ton carnet, tu continues de douter. À moins qu’un talent caché se réveille en toi quand le sommeil te tend les bras, ces coups de crayon ne sont pas les tiens. Cela restera un mystère, mais il est peut-être mieux ainsi. Trop occupé à regarder ta feuille, tu ne remarques pas par la fenêtre un petit flocon tombé en plein été.

Jour 10 : Motif

    Tourner. Virer. Chercher. Tu ne sais quoi écrire. Tu te dis que tu devrais lire. Mais tu n’as pas la motivation. Alors tu retournes te poser sur le canapé. Tu réfléchis de nouveau. Tu cherches une idée. Tu te dis qu’elle n’est pas bien loin. Elle te tend les bras.

 

    Tourner. Vriller. Danser. Tu ne sais quoi faire. Tu te dis que tu devrais te reposer. Mais tu n’as pas l’envie. Alors tu retournes danser sur la musique. Tu t’évades de nouveau. Tu attrapes une idée. Tu te dis que c’est possible. Elle t’agrippe le bras.

 

    Tourner. Parler. Bredouiller. Tu ne sais quoi dire. Tu te dis que tu devrais te taire. Mais tu n’as pas le courage. Alors tu retournes bégayer quelques mots. Tu te perds de nouveau. Tu oublies une idée. Tu te dis qu’elle ne reviendra pas. Elle est loin des bras.

 

    Tourner. Avancer. Reculer. Tu ne sais quoi bouger. Tu te dis que tu devrais courir. Mais tu n’as pas l’énergie. Alors tu retournes t’assoir au milieu du chemin. Tu t’endors de nouveau. Tu rêves d’une idée. Tu te dis qu’elle est là. Elle t’ouvre les bras.

 

    Tourner. Boucler. Bloquer. Tu ne sais quoi penser. Tu te dis que tu devrais arrêter. Mais tu n’as pas l’inspiration. Alors tu retournes manger un morceau. Tu tournes de nouveau. Tu tiens une idée. Tu te dis qu’elle est écrite. Elle est dans tes bras.

Jour 9 : Balancer

    Tu chantonnes. Tu fredonnes. Une chanson de l’enfance. Une chanson que tu as dû apprendre un jour. Un seul mot et la voici dans ta tête. Tu ne sais comment l’enlever. Mais as-tu réellement envie de l’enlever ? Il y a des jours où il est plus simple d’avoir des chansons qui tournent en boucle plutôt que certaines pensées et aujourd’hui en fait partie.

 

    Tu voyages avec la musique. Un coup, tu vas à Rio dans un petit village caché sous les fleurs sauvages. Tu te dis que cette ville est bien le paradis du Brésil. Mais à peine posé, New York te tend les bras. Tu te vois dormir dans un hôtel délatté et trainer du côté gay. En parlant de cela, tu entends déjà les bourgeois du XVIe se demander pourquoi ils s’aiment. Alors que tu vois cette petite bourgeoisie qui boit du champagne.

 

    Stop. Tu coupes le son. Et tu remets le son. De retour en France, à l’aube, il est six heures Paris s’éveille. Le ciel est gris. Les gens aigris. Tu es pressé de les retrouver. Vous vous êtes donné rendez-vous dans dix ans. Même jour, même heure, même pomme. Tu t’assois sur un banc, cinq minutes avec eux. Tes copains tu ne les oublieras jamais.

 

    Stop. Tu coupes le son. Et tu remets le son. Une valse à trois temps commence. Tu la suis. Tu la danses. Tu enchaines les pas sur un quatre temps. Tu t’offres un détour du côté de l’amour. Car on croit toujours aux mots doux d’amour, quand ils sont dits avec les yeux. Comme les yeux bleus d’Isabella. Parler te semble ridicule. Tu t’élances puis tu recules. Tu marches seul dans les rues. Tu attends juste une main.

 

    Tu continues ainsi durant plusieurs minutes. Tu te perds de chanson en chanson. Tu en oublies presque celle qui a tout déclenché. Tu ne discernes plus tes pensées des paroles. Tu ranges dans ces moments là dans un placard tes idées noires. Et les notes peuvent alors se danser et nous reviendrons les chanter.

Jour 8 : Frêle

    Tu écoutes. Tu entends. Tu pleures. Tu ne sais comment réagir. Tu te renfermes. Tu te recrovilles sur toi-même. Tu tentes de calmer l’esprit. Mais les images défilent en son cœur. Les souvenirs tournent. Les mots retournent. Une scène se distingue. Un personnage mis en avant. Tu fermes les yeux pour mieux l’observer. Te concentrer sur lui quelques instants…

 

    Petit écureuil. Un simple petit mammifère rouquin. Il est allongé. Près de lui un instrument de musique. Un petit ukulélé. Ses cordes sont brisées. Il est bien abîmé. Tout comme le petit. Il a sûrement dû tomber. Il ne se réveille pas.

 

    Un enfant s’approche. Il est avec un adulte. Innocence prend l’animal dans les bras. Responsabilité lui récupère l’objet. Ils semblent paniqués. Ils courent. Comme s’il ne fallait pas perdre de temps. Comme si l’écureuil était essentiel à l’équilibre.

 

    Autour d’eux, les ombres gagnent du terrain. Elles grappillent tout sur leur passage. Elles attrapent toutes les personnes sur leur chemin. Elles grisent le monde coloré. Elles veulent, comme s’approcher du petit être assommé.

 

    La course se termine dans une petite maison isolée. Dans celle-ci, une jeune femme au beau chapeau au regard inquiet. Des petites fées, elles, volent dans tous les sens. Et un homme à la redingote reconnaissable reste dans son coin, comme tétanisé et perdu à la fois.

 

    Les fées aident Responsabilité à réparer l’instrument. Ils font de leur mieux. Même Passion, met la main à la patte en tentant de trembler un peu moins. Un doux mélange d’Émotions et de Passion, combinés avec un peu de Responsabilités. Le tout permettant de réparer le petit objet à corde non sans mal.

 

    De l’autre côté, la jeune femme et Innocence essayent de soigner le petit écureuil. Elle pose son chapeau sur la table pour que l’Amour berce le petit être. Innocence à son chevet et Sensibilité au-dessus de lui. Ils font leur maximum pour aider le petit à retrouver le chemin du réveil.

 

    Les ombres se rapprochent de la maison. Elles gagnent la porte. Elles l’englobent. Un œil ouvert. Elles s’avancent et attrapent une des fées. Un second œil. Elles ne s’arrêtent pas. Elles piègent les deux hommes. Un mouvement. Un son. Une lumière.

 

    Le petit s’est réveillé. Le petit vient de sauter sur son instrument. Le petit vient de jouer une note. Difficilement. Mais il vient de le faire. Il joue pour écarter les ombres. Il joue pour remettre de la lumière. Il joue pour colorer le monde. Et bientôt, quand il sera remis il jouera du haut de son arbre.

 

    Qu’obtient-on quand on mélange de l’amour, de la sensibilité et de l’innocence ? Un doux mélange permettant de réveiller l’Espoir qu’on pensait endormi.

 

    Tu relèves la tête. Les larmes toujours présentes. Mais tu souris à cette pensée. Même si l’écureuil est fragile tout comme son instrument, la musique de l’Espoir retentira toujours même si elle se fait plus faible parfois.

Jour 7 : Enchanté

    Tu marches. Comme à ton habitude. Tu marches souvent. Tu aimes sentir l’air sur ta peau. Même quand il pleut. Tu ne déroges pas à tes ballades quotidiennes. Tu apprécies la sensation de l’eau glissant le long de ton visage. Cela te fait sentir vivante. Cela te donne ce quelque chose de plus. Seule sous la pluie, tu n’as besoin de personne pour prendre conscience que tu es là, ici, maintenant, à sûrement tomber malade à rester trop longtemps sous ce déluge.

 

    Une autre chose qui te fait sentir toi, autant que cela te perd, c’est la musique. Tu l’entends sur ton chemin. Tu la suis sur ton chemin. Tu la poursuis. Tu cherches à la retrouver. Tu en cherches l’origine. Tu es envoûtée par cette mélodie. Tu es comme cette souris enchantée par le joueur de flûte. Tu ne peux t’en empêcher. Quand il s’agit de musique, tu es là.

 

    Toi qui comptais sortir rapidement de ce bâtiment, tu te retrouves à la parcourir dans tous les sens. Tu montes puis descends les escaliers. Tu le traverses en long et en large. Tu as l’impression que les notes jouent avec toi. Tu ne sais où chercher. Comme si elles venaient de tous les côtés. Et de nulle part à la fois. Tu hésites à abandonner…

 

    Mais, tu entends des rires. Tu les rejoins. Une porte. De la musique. De la lumière. Il ne t’en fallait pas plus. Tu entres. Tu es comme dans un état second. Timidité envolée, te voilà à demander à une jeune femme sa main pour danser. Tu ne sais pas ce qui te guide. Tu ne sais pas ce qui t’arrive. Tu danses simplement. Avec les notes, tu n’es pas toi, au sens de toi. Tu es simplement toi.

 

    Tu te sens à la fois plus sensible et moins timide à la fois. Cela t’aide à t’exprimer. Cela te permet d’évacuer. Et en même temps, tu reçois autant que tu donnes. Tu fais le plein de bonheur. Tu te remplis de couleur. Chaque note apportant la sienne. Chaque pas, ajoutant une nuance. Tu danses dans un tourbillon arc-en-ciel. Tu vis au pays des merveilles.

 

    Tu te perds dans la chanson. Tu chantes. Tu danses. Tu oublies les règles. L’amusement passe avant. Tu es là. Tu souris. Tu ris. Tu manques de tomber. Elle manque de glisser. Les mains se loupent. Vous rigolez. Vous profitez. Vous plaisantez. Vous partagez. Pas beaucoup de mots. Mais tellement de choses sont dites.

 

    La musique est une magie colorée qui enchante les sentiments et qui envoûte les cœurs. Elle fait se mouvoir la partition de la vie et raisonner avec elle, les pleurs et bonheurs.

Jour 6 : Costaud

    Tu marches doucement. Tu explores. Tu contemples. Tu t’étonnes. Tu observes ce petit papillon voler. Tu regardes ces fourmis travailler. Soudain, quelque chose te vient. La vie est quelque chose d’éphémère. Alors, pourquoi travailler comme cette fourmi alors que nous pourrions voyager comme le papillon ?

 

    Tu te questionnes. La vie a-t-elle un sens ? Mais si elle n’en a pas qu’en est-il de tout ce que nous faisons sur cette terre ? Nous tentons de trouver du sens à quelque chose qui n’en a peut-être pas. Et si un sens nous apparaissait, la vie ne deviendrait qu’une mécanique sans le mystère qui fait son charme.

 

    Tu lèves les yeux au ciel en continuant tes réflexions. Si nous partons du principe que la vie n’a pas de sens. Alors nos actions n’en ont pas plus si elles se font dans un contexte qui n’a pas plus de sens que le sens lui-même. Cela signifierait que nous essayons de donner une définition à quelque chose que nous ne pouvons définir. Est-ce que le sens a toujours du sens quand nous tentons de le définir dans un contexte qui n’en a pas ? Pouvons-nous réellement donner pleinement sens à un mot se posant à ses propres limites du sens ? Comment donner un sens aux choses quand la vie qui englobe les réalités n’en possède pas ?

 

    Tu commences à avoir les pensées qui se mélangent. Le sens, qu’est ce que le sens si le sens n’a pas de sens dans le sens où le sens ne s’applique pas à tout ? Aimer a-t-il du sens lorsque c’est la seule chose qui donne du sens à une existence ? Ceci n’a pas de sens. Si la vie a un sens, aimer aurait-il le même sens que le non-sens qui lui est donné ? Si elle en a un, le sens de la vie serait-il le même pour tous ou le sens serait une définition propre à chacun ? Une définition est-elle réellement une définition si chacun a la sienne pour un même mot ? Pouvons-nous toujours nous comprendre si le sens même du mot sens est unique pour chacun, ne craignons-nous pas que le sens d’autres mots prenne son sens dans un autre sens que le sens commun du sens et que le sens donné change alors de sens pour qu’il devienne sensé que chacun ait son propre sens ?

 

    Tu cogites, tout est sens dessus dessous. Le sens part dans tous les sens si chaque sens à son propre sens qui dépend à la fois du sens commun et du sens individuel. Comment avancer dans le même sens si l’essence même du sens dépend du sens que chacun apporte ? Pouvons-nous communiquer si nous n’avons pas le même sens des mots ? Avons-nous vraiment besoin de donner un sens à la vie ? Si nous ne cherchons pas à lui donner du sens alors le sens de…

 

    Tu te stoppes. Tu es stoppée. Tu étais tellement perdue dans tes pensées que tu ne l’avais pas remarqué. Tu t’excuses et tu remercies l’homme. Grâce à sa carrure, il venait de t’arrêter alors que les réflexions commençaient à te ronger.

Jour 5 : Construire

    Tu le vois. Une photographie. Une petite annonce. Tu ne peux t’en détacher. C’est lui. Tu le sais. Tu le sens. Il y a quelque chose dans son regard. La malice chez le bébé. Encore petit, mais déjà ce petit air. Ce petit truc en plus. Ce qui fait toute la différence. Ce qui fait changer d’avis.

 

    Un appel. Quelques jours plus tard, te voici dans le train. Tu es partie pour le voir. Tu as hâte de le voir. Tu sens au fond de toi. Un sentiment étrange. Un bon pressentiment. Tu ne sais d’où il vient. Tu n’écoutes que d’une oreille distraite l’éleveuse. Tu le sais…

 

    Tu le vois. Il te voit. Tu le portes. Il descend. Un peu sauvage le petit. Chaton bien vif. Il court, mais il revient vers toi. Il embête le chien, mais quand il te voit en approcher un autre, la jalousie le prend. Il se rapproche. Il ne te lâche plus. Il reste près de toi.

 

    Les « en revoir » compliqués. Tu retiens une larme de couler. Dans un mois, tu le reverras. Tu comptes les jours le séparant de toi. Tu le sais maintenant, il y a un petit truc. Ce petit quelque chose de spécial. Comme si le destin avait décidé de lier vos routes.

 

    Période compliquée pour toi. Très compliquée. Tu as du mal. Tu ne vas pas forcément bien. Il arrive pourtant ce matin. On te dit que ce n’est pas grave si au début il t’ignore. On te met en garde sur son caractère distant. Tu as un peu peur en ouvrant la porte de son transport.

 

    Il sort doucement. Timidement. Il fait un très rapide tour. Puis il se colle à toi. Il ne te lâche plus. Il demande des câlins. Il demande à jouer. Il y a un quelque chose entre vous deux. Quelque chose de fort. Tu ne sais pas vraiment ace au début.

 

    Les jours, les semaines passent. Il s’habitue à son environnement. Il prend ton rythme. Le câlin avant de se coucher devient comme obligatoire. Il prend ta défense parfois. Il vient quand tu fais des cauchemars. Il s’approche quand tu pleures. Il ronronne quand tu stresses. Il est là. Tu es comme perdue quand il n’est plus là…

 

    La relation que l’on peut avoir avec son animal est quelque chose de formidable. Il peut être à la fois protecteur et jaloux. Un poil possessif quelques fois. Le lien se construit et se renforce tous les jours. Il est ton petit ange gardien rouquin et câlin.

Jour 4 : Glacer

    Une rencontre. Sur un coup de tête. Un message. Un rendez-vous. Tu changes ton emploi du temps pour être présente à temps. Tu sens petit à petit l’angoisse monter. Les bonds dans l’inconnu ne sont pas vraiment ton fort. Jouer avec le destin et les incertitudes te titille un peu. Mais, tu ne sais pourquoi, ce jour-là, ton cœur a choisi pour toi.

 

    La voir au travers de la porte vitrée. L’accueillir. Gêne présente. Tu l’invites à te suivre. Vous vous installez. Silence pesant. Trouver quelque chose à dire. Tu brises le calme, trop calme. Tu la lances sur un de ses thèmes préférés. Tu tentes de détendre les fils tendus dans l’air. Tu essayes d’assouplir l’atmosphère. Tu la vois sourire.

 

    Vous discutez longtemps. D’elle. De toi. De tout. De rien. Tu apprécies beaucoup l’écouter. Elle est passionnée. Les conversations changent. Les débats se lancent. Les sujets s’échangent. Les mots dansent. Les partitions se forment. Les instruments jouent en harmonie. Comme la guitare qu’elle vient de prendre dans ses mains et qui se joint à la mélodie.

 

    Elle joue. Tu te perds avec la musique. Il ne faut pas te lancer avec la musique. Tu en perds la notion du temps. Tu en perds la notion de l’espace. Il n’y a qu’elle et toi. Une bulle mélodique. Les notes volent. Tu peux presque les voir s’échapper des cordes piquées. Les notes s’échappent quand les accords sont grattés. Tu observes les doigts danser.

 

    Tu remontes doucement le regard. Elle ne te remarque pas. Ou peut-être que si. Tu ne sais pas. Tu n’y fais pas attention. Tu te perds. Encore et toujours. Tu la regardes. Tes yeux se posent sur ses cheveux. Une envie de les toucher te prend. Tu tentes de l’oublier en décalant le regard. Les yeux. Deux pépites de passion et de concentration. Tu ne peux…

 

    Tu t’en détaches lorsqu’elle te surprend. Le rouge te monte aux joues. Tu ne sais pas quoi faire. Tu es comme prise au piège. Tu proposes de ranger l’instrument. Une simple excuse pour esquiver les regards. Tu sens ton cœur commencer à s’emballer. Tu n’as que quelques secondes pour le calmer. Soudain, visionner un film est décidé. Alors côte à côte, sur le canapé, installées.

 

    La bougeotte te prend un peu. La fatigue la suit rapidement. Tu tournes. Tu vires. Tu ne trouves pas comment t’installer. Tu essayes de ne pas la déranger. Puis un bras. Un mouvement. Tu te retrouves dans les siens. Tu ne vois pas l’écran, mais peu importe. Un câlin cela ne se refuse pas. Le cœur s’emballe de nouveau. Les pensées cogitent.

 

    Au fur et à mesure du film, tout s’accélère. Tu ne sais pas vraiment quoi faire. Ton cerveau ne sait plus à quoi penser. Ton cœur ne peut battre plus vite. L’un des deux va finir par lâcher. L’instant est important. Quelques minutes avant la fin. Tu sens ton bras commencer à te faire mal. Il va falloir bouger. Tu tentes alors de te redresser.

 

    Tu es alors bloquée. Autant physiquement, par un bras, que mentalement. Le cerveau ne répond plus. Le cœur ne répond plus. L’un s’est arrêté. L’autre a de nouveau accéléré. Tu es perdue. Tu restes figée. Tu ne sais quoi faire. Tu ne sais quoi dire. Tu ne sais quoi penser. Tu es incapable de faire quoi que ce soit.

 

    Quand soudain, la formule magique. Ou plutôt le geste magique. Comme dans les contes pour enfants. Un baiser pour libérer du mauvais sort. Un doux baiser pour se débloquer. Un simple baiser qui permet de réchauffer et calmer à la fois. Parfois, il ne suffit pas de grand-chose, un simple sentiment, un simple geste, un simple mot, un rien et l’effet papillon prend son envol.

Jour 3 : Appât

    Tu marches. Tranquillement. Tu avances sur le chemin dessiné. Tu suis le tracé. Au bout, le but, le final, la conclusion. Tu t’en approches à ton rythme. Les mains dans les poches. Les yeux fixés sur l’objectif. Ne pas regarder à côté. Continuer sur ta lancée.

 

    Cependant, un papillon te coupe le chemin. Tu ne peux te retenir. Tu le suis. Les bras dans les airs à faire des gestes. Tu redeviens enfant. Courant après l’être ailé. Tu t’éloignes de la ligne. Tu t’en écartes. Un petit détour. Un simple petit détour…

 

    Un château. Quel beau château ! Et si tu le visitais ? Pas le temps d’attendre la réponse des pensées, te voilà déjà les doigts autour de la poignée. Tu ouvres grand la porte. Une magnifique salle de réception devant toi. Tu te surprends à chantonner une mélodie. Tu te mets à danser. Encore et encore. Puis la musique se fait de plus en plus difficile à entendre. Tu décides alors d’en trouver l’origine.

 

    Quand tout à coup, une voix résonne et te voilà de nouveau sur le chemin. Tu suis le fil rouge. Sur ton trajet, un village sur ta droite. Tu te retiens d’aller y faire un petit tour. Sur ta gauche, un lac, piquer une tête est très tentant. Tiens, un écureuil, et si tu jouais avec lui ? Où es-tu ?

 

    J’ai eu tort de penser qu’avec la quantité de tentation tu arriverais à suivre le chemin sans vague. Mais te voici à sauter dans l’eau. Tu rigoles quand des petits poissons viennent te chatouiller les pieds. Tu gardes le sourire malgré le fait que tu sois plus d’une fois tombé en voulant sortir. Tu réussis finalement à l’extirper hors de l’étendue d’eau.

 

    Un quelque chose te pousse de nouveau vers la route que tu ne fais que traverser pour aller te balader dans la forêt. Au nord, de cette forêt, tu te surprends à te perdre dans un village. Puis au loin, tu repères un champ de fleurs que tu décides de visiter. Mais que vois-tu ? Une grotte et son dédale de tunnels. Tu t’amuses alors à jouer dans ce labyrinthe loin de la voie.

 

    À la sortie du dernier passage, le sentier rouge t’attend. Tu souris. Tu avances serein vers le but. Vers la conclusion. Il est parfois bénéfique de ne pas suivre le chemin classique de la conversation et de se laisser tenter par les idées vagabondes. Ariane nous aidant à ne pas perdre le fil et à arriver au point final.

Jour 2 : Stupide

    Tu t’avances. De ton coin tu t’éloignes. Vers le centre, tu te diriges. Aucune hésitation. Tu ne sais pas bien ce que tu fais. Tu as juste une envie. Tu as juste envie de le faire. Tu te laisses guider par ton corps. Ton corps guidé par des pensées en vrac. Ou plutôt en rythme. La musique les entraîne. Comme si chacun des pas sur le sol résonnait en même temps que les notes de la mélodie.

 

    Ta main dans la sienne. Tu l’entraînes à ta suite. Tu ne la lâches pas. Alors une idée. Alors des pensées. De nouveaux mouvements. Tu changes de main. Puis tu la fais tourner. Tu rigoles avec elle. Tu joues avec elle. Vous profitez de la musique. Vous souriez ensemble. Une bulle vous protégeant. Deux personnes dansant ensemble. Deux âmes amoureuses vivant pour le moment.

 

    « Un joli collier, pour une jolie demoiselle ! »

 

    La phrase sort par elle-même. Naturellement. Prenant compte de tes mots, le rouge monte à tes joues. Tu tentes de continuer ta danse, comme si de rien n’était. Tu esquives les regards. Tu prends la couleur des pivoines. Mais la fin de la chanson approche. Le final pour bientôt. Tu essayes de ne plus penser aux mots envolés dans la musique. Tu te concentres…

 

    Une dernière passe. Une dernière note. Un penché pour clôturer l’instant. Tu la regardes. Tu te perds. Son regard. Des étoiles. Des milliers d’étoiles. Ils brillent de mille feux. Ils scintillent. Tu ne peux t’en détacher. Tu l’aides à se redresser sans quitter ses yeux. Tu es comme hypnotisée. Alors une pensée te traverse de nouveau l’esprit. Non, tu ne peux pas. Il y a trop de monde. Que penserait…

 

    Des lèvres contre les tiennes. Ce n’était peut-être pas le lieu. Les personnes n’étaient peut-être pas au courant. Mais le moment était parfait. Tu ne peux décrire ce que tu ressens. Tu ne peux l’exprimer. Tu es juste sans voix. Même ton esprit à l’habituel trop rapide ne sait plus vraiment quoi faire. Cela ne lui ressemble pas.

 

    « Allez faire cela ailleurs… »

 

    Une voix. Se détacher. Incompréhension. Pourquoi ne pas avoir le droit de s’exprimer ? Les quelques secondes ont semblé durer plusieurs minutes. Mais tu es sûre que cela fut bref. Trop bref à ton goût. Tu te trouves alors idiote d’avoir cru pouvoir exprimer tes sentiments sans retenue. Cependant, un regard t’amène à penser que la jalousie fait parfois dire des idioties.