Il était une fois, il y a fort longtemps, dans un petit village perdu au milieu des bois, un jeune homme des rêves pleins la tête et des…
Non, mais écoutez-le, on dirait qu’il va nous rejouer un de ces contes pour enfants de cape et d’épée ! « Il était une fois, il y a fort longtemps dans un village perdu… » Et puis quoi encore ? Un dragon ? Des combats à l’épée ? Une princesse à sauver ? Tu ne peux pas trouver mieux, là tu es plus que dans le cliché mon ami. Aller reprends donc, un peu plus original cette fois-ci.
Donc… il n’était pas une fois, dans une grande ville mondaine…
Stop. C’est quoi ça ? Je t’ai demandé un truc original pas totalement décalé. Reprend avec ton « Il était une fois » c’était pas mal.
Il était une fois, dans le petit village de Vignes-Raisins, un jeune homme. Un jeune homme au look banal, rien de bien original. Il aimait bien rêver, rire et jouer. Il ne pensait pas vraiment au lendemain.
Tu es vraiment sérieux avec ton histoire ? Tu ne peux pas faire un peu plus original ? Un gars paumé, qui rêve et qui ne pense pas au lendemain… « Carpe Diem » ? Dis-moi que c’était une blague… tu ne peux pas lui donner un peu de peps, d’innocence, de vie, d’histoire ! Un peu de magie ! Je sais pas moi change d’univers, au lieu d’être dans le Moyen Âge et la fantasy, bascule dans le fantastique. Rajoute des Minotaures.
Des Mino quoi ?
Des Minotaures, faudrait que tu revoies ta mythologie. Enfin, tu vois ce que je veux dire ? Aller reprend. J’essaye de ne plus t’interrompre. Enfin j’essaye…
Reprenons alors…
Il était une fois, dans un petit village français, une maisonnette où vivaient un jeune homme et sa mère. Si l’ambiance pouvait avoir une couleur, elle serait grise. Ternie par les larmes qui coulaient. Noircie par la disparition de la fille et sœur. Ce faisait un an jour pour jour que celle-ci n’était pas rentrée à la maison. Un an que le frère remuait ciel et terre pour la retrouver. Sa mère, elle était trop fatiguée. Il lui avait promis. Il voulait tenir sa promesse. Alors malgré le jour symbolique, il se décida de retourner au village voisin pour tenter de nouveau d’avoir des renseignements. Son ancienne piste l’ayant conduit à une impasse, il devait tout reprendre…
Notre jeune Jack était motivé. Il ne doutait pas qu’un jour, il retrouverait sa sœur et le sourire de sa mère apparaîtrait de nouveau. Il espérait pouvoir trouver une nouvelle piste aujourd’hui. Une piste qui le mènerait jusqu’à la disparue. Mais en attendant, il marchait dans les rues pour rejoindre le port Quiberon côté Initié. Un de ses amis de l’équipe de Baseball local avait réussi à avoir des informations. Il avait rendez-vous. Il avançait, avançait vers cet espoir, lorsque sa route croisa ou plutôt heurta celle d’une jeune fille qui semblait bien affolée…
– Doucement, mademoiselle, que se passe-t-il ? Je peux vous aider ?
La jeune fille aux larmes qui s’écrasaient sur le sol avait un peu de mal à parler. Puis son regard sembla attrapé par quelque chose et elle bredouilla deux ou trois mots.
– Mon chaton… échappé…
Héros au grand cœur…
Ne me dis pas que tu vas le faire courir après le chat ? Il a sa sœur à sauver, déjà j’ai rien dit pour les clichés, mais là… Tu ne vas pas faire cela, si ?
Héros au grand cœur, Jack rassura la jeune fille d’une main sur l’épaule et s’élança à la suite du quadrupède dans le dédale des rues. Oubliant l’espace d’un instant son objectif premier.
Tu m’ignores maintenant ? C’est nouveau. Puisque c’est comme cela continue dans ta non-originalité…
Il poursuivait le chat d’un noir se mêlant aux ombres à travers des rues qu’il ne reconnaissait pas forcément tout. Il ne réfléchissait pas vraiment. Il esquivait les passants et les autres animaux pour atterrir dans une petite ruelle de la ville assez étroite. Il entendit un miaulement, il eut tout juste le temps de sauter par-dessus le chaton avant de faire deux pas et tomber à la renverse trébuchant sur quelque chose ou plutôt quelqu’un.
– Vous pourriez prensdre grand-garde…
Le héros releva doucement la tête. Face à lui, un chat aux yeux vairons le regardant fixement. Ce n’était pas son chat. Celui-ci semblait bien accompagné. Sûrement le père du petit évité peu de temps auparavant.
– Il est haustement disgracieux de choir sur meilleur que toi de cette manière socialement fort discourtoise !
Jack était confus, pensant sur le coup s’être cogné la tête un peu fort.
– Un chat qui parle ? Je dois…
– Or donc rustre enfançon, m’est avis que tu pourrais t’élever de ton séant ! Je ne suis guère un vil félin crasseux et vagabond ! Il m’incombe de te révéler que nous sommes vertueusement dissonants.
Jack n’en croyait pas ses oreilles. Il ne se fit pas prier et se leva d’un bond. Faisant peur à la petite troupe de chats aux yeux particuliers au passage. Il examina le sol et remarqua une petite forme s’essuyant la poussière. Il s’accroupit à sa hauteur et commença à approcher la main comme pour vérifier ce qu’il voyait, mais se prit une tape dessus par l’objet en mouvement.
– Aïe. Depuis quand une… enfin un machin comme cela parle et en une sorte d’ancien français en…
– J’exige un minimum de respect en mon endroit, Je ne suis point objet de gueuserie. Et j’eus pu être ton concepteur au regard de mon âge ! Un initié au funeste destin tel que moi, maléficié à vivre mille tourments, claquemurés dans un jouet pour enfant. Mais… mais quelle est donc cette effronsterie ? Repose-moi séance tenante !
– On va voir l’initié-médecin de la ville, il aura sûrement une solution. Il n’est pas loin…
L’objet à la forme d’ourson en peluche et tout d’engrenage vêtu sous le bras, le jeune homme s’élança dans les rues. Tentant de retrouver son chemin, jusqu’à l’antre des potions et runes de l’ancien. Il l’avait bien guidé. Un ancien ami du père de Jack, le vieil homme à la longue barbe grisonnante, vivait près de ses ustensiles. Toujours prêt à créer une nouvelle potion, un nouveau remède. Il aurait certainement la réponse aux questions de notre jeune héros et de son problème de chose parlante.
Quelques minutes plus tard, le jeune homme franchit un peu essoufflé la porte de la petite boutique. Elle regorgeait de mystères et d’objets en tous genres. Des pendentifs runiques aux chaudrons en passant par des poupées vaudou et des fioles remplies de substances aussi étranges les unes que les autres. Jack s’attarda un instant. Il observait, analysait. Il avait l’impression que ce lieu avait sa propre vie et n’était plus le même d’un jour à l’autre.
Alors qu’il se perdait dans ses réflexions, la peluche gigotant toujours sous le bras, des paroles le réveillèrent.
– Bien le bonjour, Jack Junior, comment vas-tu ? Cela fait longtemps que tu n’es pas venu mon ami. Que me vaut le plaisir de ta visite ?
Jack se retourna aussitôt. Le vieil homme aux allures de père Noël se tenait près de lui. Il ne l’avait pas entendu venir trop occupé à tenter de deviner l’utilité des outils sur l’étagère face à lui.
– Bonjour Mr DuChêne, je vais très bien merci. Je suis toujours à la recherche de ma sœur, mais en chemin j’ai croisé cette drôle de… enfin vous voyez, il dit être un initié.
– Mon nom baptismal demeure ToyNoc, adoubé Sir à une époque où vous n’étiez point né ! Or donc, jeune impertinent, il serait en ma convenance de pouvoir fouler de mes prospres pieds ce sol consacré ! J’éprouve mille ravissements de vous rencontrer, mestre Duchêne. J’ai ouï dire par la bouche même de mon tourmenteur que vous auriez la faculté de m’être d’une précieuse aidance…
– Désolée Toy, mais je n’aimerais pas que quelqu’un te marche dessus…
– J’exige le respect de ma titulature : SIR ToyNoc !
– Vous n’allez pas vous disputer ici, nous devons trouver une solution pour ce monsieur ToyNoc, suis moi Jack, on va dans mon laboratoire…
Jack qui n’avait pas reposé la peluche, suivit l’ancien. Son laboratoire comme il aimait bien l’appeler était un antre des potions dans l’arrière-boutique. Les murs étaient couverts d’éprouvettes et de livres. Le bureau se cachait sous les feuilles et les crayons. Le sol disparu. Il fallait faire preuve de ruse pour marcher sans rien abîmer.
L’homme marmonna quelque chose dans sa barbe et indiqua à Jack de rester à sa place. De son côté, l’homme arbre nageait dans ses notes. Courrait vers les livres qui rejoignaient le sol les uns après les autres. Il semblait avoir une idée en tête et ne voulait pas en démordre.
Tout à coup, un petit bruit attira l’attention du héros. Ce dernier vit sur le sol un petit engrenage en tous points identique à ceux qui ornaient la peluche. Il paniqua alors. Il savait qu’il ne devait rien toucher dans le laboratoire, mais il ne pouvait pas laisser la peluche tomber en morceaux. Il se pencha alors vers le sol discrètement en essayant de ne pas se faire voir par le savant. Il ne voulait pas se faire sermonner. Mais quand il s’apprêta à frôler la pièce de métal, il sentit qu’on le poussait dans le dos et il tomba sur la pièce…
Il va se faire kidnapper par des grands méchants c’est ça ? Quelle imagination !
Tu pourrais me laisser faire ?
Mais oui, mais pas de kidnapping…
Un bruit. Un atterrissage pas des plus agréables sur le sol. Autour de notre héros la forêt qui s’étendait à longueur de vue. Il ne le savait pas, mais il se trouvait toujours dans le pays de la baguette, mais avait changé un peu de zone géographique. Il avait un peu de mal à se relever. Quelque chose était sur son dos et sauta devant lui. Le félin ébène qu’il avait poursuivi…
– Que fait ce chat ici ?
Il se leva d’un coup. Se rappelant qu’il n’était pas seul. Il ne voulait pas se faire remonter les bretelles une nouvelle fois par la peluche. Il se redressa et observa les environs tandis que le chat se rapprochait de l’objet vivant.
– Mais on est où ? Toy ça va ?
– SIR ToyNoc, je ne suis point un trivialeque austomate !
– Excuse-moi ToyNoc, mais au fait comment tu es devenu peluche ?
– Jack, souffre que je te conte ma geste ! Héritier d’une noble ascendance, je ne mansquais de rien, sauf peut-être de ce que les membres de la roture prise tant : la chaleur humaine. Force me fut de considérer mes géniteurs comme des déserteurs, m’ayant asbandonné aux mains de la domesticité. De l’heure où je fus doué de raison, j’abandonnais les tristes considérations matérielles pour m’abreuver des connaissances compulsées dans les grimoires de la bibliothèque familiale. Le temps filait. Les histoires, les contes d’antan itou des temps modernes enflammaient mon imagination. Rien ne me passionnait plus que les récits des hauts faits d’armes des chevaliers. Or donc, je décidais, alors qu’à peine j’eus ton âge, de rendre courtoises visites à ces preux et d’à mon tour, de revêtir l’armure et de partir en quêste. Malgré ton ignorance crasse, j’ose espérer que tu n’es point étranger aux machineries à parcourir le temps ? Apprends que je me suis aventuré à en confectionner une. Mon entreprise fut couronnée de succès. Une seule chose me faisait défaut : une source d’énergie magique. Qu’à cela ne tienne, je montrais ma dévotion en poursuivant vaille que vaille mon rêve. Hélas, la voie des dieux est insaisissable et il y eut un revers de la médaille. L’affaire prit une forte étrange tournure… Je tombais en pâmoison. À mon éveil, je me retrouvais prisonnier de ce corps, mêlant l’ourson en peluche et ma machine. Longue et éprouvante fut mon errance. Mes pas finirent par me mener en cette cité, cette ruelle. La suite, tu en as été témoin…
– Oui, j’ai couru après ce chat, puis j’en ai esquivé un, je suis tombé sur toi. On est allé voir Mr Duchêne et on a atterri ici. Maintenant nous devons trouver un moyen de sortir d’ici avant que…
– Songe tel un proton, avec fulgurance, fragile enfantelet.
– Un proton ?
– Oui, demeure positif…
Le petit groupe de trois marchait tranquillement. Le chat devant, un pas lent au rythme de la peluche. Ils discutaient quand soudain devant eux une créature apparue. Un loup qui…
Stop. Le coup du loup c’est du déjà-vu. Tu oublies tes classiques ou tu t’en inspires de trop. La belle et la bête cela ne te dit rien ? Aller transforme moi ce loup rapidement…
Quand soudain un serpent à trois têtes apparut. Sûrement…
Échappé d’un zoo ? J’avoue l’idée est belle, mais soyons un peu cohérent avec l’époque et la géographie. Tu as une autre idée ?
Quand soudain, un douchat apparaît. Il grognait. Semblait très agressif. Pourtant ce chat d’initié à trois queues ne l’était que principalement envers les ennemis de son maître. Jack était un peu déboussolé. Il se mit devant l’ourson en guise de bouclier et sortit sa stèle comme arme. Mais il n’eut point le temps de lancer le moindre sort que le chat lui sauta dessus, lui mordant le poignet et récupérant l’objet magique au passage. Le héros n’eut pas le temps de bouger que l’animal était hors de portée de vue.
Il venait de perdre sa stèle et gagner de la douleur. Le jouet semblait avoir un peu de cœur déchirant le T-shirt du héros à sa manière après lui avoir demandé de s’accroupir, et lui fit un bandage sur le poignet. Jack le remercia du regard. La suite du trajet se fit sans un mot.
Le héros se tenait un peu le poignet. La douleur partait doucement. Il n’osait plus dire mot. Le petit groupe était des plus silencieux, ne voulant pas attirer de nouveau des animaux. Jack avait de quoi se défendre, mais préférait ne pas sortir son épée maintenant. Il pensait qu’au moindre bruit ou mouvement brusque ils se feraient de nouveau attaquer. Le chat semblait connaitre les environs. Jack se contentait de suivre alors que la chose parlante elle se battait avec quelques insectes qui venaient l’embêter.
Après plusieurs minutes, plusieurs heures, le temps n’ayant plus vraiment d’importance quand la fatigue commençait à prendre le dessus, ils découvrirent au détour d’un buisson un énorme portail. Il était grand ouvert sur une entrée magnifique, bien entretenue et remplie de verdure, de fleurs et de couleurs. Au bout du chemin, quelques marches et une porte. Une tête de lion en guise de heurtoir. Un animal majestueux par plus d’une fois représentée. Un beau symbole pour ce château immense au cœur d’une forêt…
Tu commençais bien, c’était super l’histoire du croup et là action suivante tu retombes dans le cliché ! Et il se passe quoi ? Tu vas le faire toquer à la porte ?
Oh je n’y avais pas pensé merci pour l’idée…
Le héros s’avançait traversant le portail, guidé par la fatigue et l’envie de se poser sans risquer de perdre la vie. Le chat en retrait et la peluche, elle se tenait aux côtés de notre apprenti chevalier qui fit signifier sa présence à la grande porte en interrogeant le lion.
Une minute à peine passa avant que l’énorme morceau de bois ne bouge. Il s’ouvrit sur une petite tête brune aux longs cheveux qui volaient quand tous les sens à mesure de ses mouvements. Sans un moment pour l’étranger à sa porte, elle s’approcha intriguée de l’objet à ses pieds. Son regard venait de changer et son sourire était celui d’un animal…
– Oh un nouveau jouet, il bouge en plus… Viens que je te dissèque, je vais te retirer quelques boulons… Je…
Clé à molette dans une main, scalpel dans l’autre, elle semblait sérieuse dans sa folie. Jack n’était pas très courageux, il reculait doucement. Peluche, elle s’était accrochée à sa jambe et quand la jeune fille fut à leur hauteur. Quand elle s’apprêta à donner le premier coup…
– Viens là !
Une seconde jeune fille. En tous points identique à la précédente, mais son visage semblait plus… doux. Ses cheveux tressés en arrière. Elle avait un quelque chose plus calme et venait d’attraper l’objet dans ses bras. Sûrement des initiés.
– ToyNoc !
Jack fit un pas, mais fut rapidement arrêté par la jeune chirurgienne. Il prit soin de ne pas faire de mouvement pouvant énerver la brunette tandis que sa sœur paraissait aimer son nouveau jouet. Elle le câlinait puis l’embrassa sur le haut de la tête. Puis dans l’instant, un homme au haut de forme couvert d’engrenages fit son apparition. L’ourson n’était plus, à sa place, un adulte dont le bras disparu était remplacé par du métal. Une redingote, un monocle, une montre à gousset rangé dans le veston. Il semblait venir d’une autre époque et pourtant…
– Et bien, engeances bouffies d’ingratitude ! Est-ce là une manière d’honorer ses démiurges ?
Le héros un peu perdu cherchait le parent numéro deux quand ce dernier passa de chat à jeune femme. Il commença à trembloter. Et recula, petits pas à petits pas. Tandis que la famille se réunissait.
– Je… Je vais vous laisser en famille, ravie de vous avoir rencontré ToyNoc…
– Attarde-toi à nos côtés, aimable jouvencet
Une stèle de sortie. Une rune dans les airs, le voilà dans l’inconscience. Cela fut rapide. Simple et efficace. Le sorcier était fort, mais le héros lui était déboussolé par les événements.
Les cachots du grand château étaient sombres et poussiéreux. Des toiles d’araignée décoraient les murs et les recoins tandis que les rats faisaient entendre leur présence à quiconque tendrait un peu l’oreille. L’humidité, la froideur des murs et l’absence de lumière n’amélioraient pas la situation. Le lieu n’était pas des plus accueillants et pourtant nous y retrouvons notre jeune…
– Jack… Jack c’est toi ?
Une voix. Bien connue par le jeune homme. Une voix qu’il n’avait pas entendue depuis un moment, un trop long moment. Mais il la reconnaîtrait entre mille. Au-dessus de lui, lui caressant la joue et en la tapotant parfois, sa sœur. Sa sœur disparut depuis un an. Il venait de la retrouver. Il avait des centaines de questions cependant ils devaient sortir d’ici.
Il savait que sa grande sœur maîtrisait les runes de téléportation or le fait de la voir encore ici lui prouvait sans qu’il ait à demander que le sous-sol devait être bien protégé. Il se releva doucement et chercha une issue.
– Cela fait un an que j’essaye Jack, rien. Il n’y a pas de solution… à part prier.
– Alors, prions Stella, mais nous sortirons. Il doit y avoir un moyen. Envoyez-nous un signe.
Le jeune homme s’adressa au plafond. Comme si les étoiles pouvaient lui répondre. Il n’y croyait pas lui-même quand une voix se fit entendre.
– Le Sir a un secret caché dans la bibliothèque.
– Mais où est cette fameuse bibliothèque ?
– Rapproche-toi des étoiles et tu la trouveras.
– Mais cela ne nous aidera pas à sortir d’ici.
– Des mots non, mais ceci peut-être…
La fille à la tresse était là. Elle semblait différente moins en retrait. Elle tenait la clef dans la main et la tourna dans la serrure. Le frère et la sœur ne comprirent pas. Devant les regards d’incompréhension, cette dernière ne put s’empêcher de laisser échapper quelques mots.
– Il faut mettre fin au mystère et j’ai besoin de changer d’air.
Jack comprit où voulait en venir la petite. Il posa une main sur son épaule et glissa l’autre dans sa poche. Il en sortit un fourreau qu’il accrocha à sa ceinture et un bouclier qu’il scella à son bras. Même blessé, il était prêt.
– Je vais vous sauver, attendez ici mon signal.
Notre héros s’élança. Montant les escaliers quatre par quatre. Il cherchait à atteindre les étoiles. Son but : trouver la bibliothèque. Il ne tarda pas à trouver l’antre des savoirs. Il avait pris soin d’éviter le chat, mais il n’avait vu personne comme si dans le château ne vivaient que des fantômes. Comme si tout cela n’était qu’un rêve.
Il referma derrière lui la porte. Les pages de connaissances étaient de partout. Les murs entiers étaient recouverts jusqu’au plafond qui semblait monter toujours plus haut. Au sol, des bureaux bien rangés. Un globe au centre de la pièce et dans l’axe de la porte un tableau. Sur le seul mur où aucun livre n’était présent. Il s’avança.
– Tiens tiens tiens ! Je perçois ton avidité curieusante face à cette toile de mestre ! L’être représenté, noble esseulé, devint foldingo quand sa moitié trépassa. Aux affres de la vengeance, il n’eut de cesse de vouloir la restrouver. Las, son âme se fourvoya dans l’abîme du sang et de la manipulation, devenus ses seules raisons de vivre. Arpentant des chemins obscurs, il acceptait des contrats sous couvert d’anonymat. Il devint le Sir Esanglant de la Forêt. Oncques n’osait plus en parcourir les sentiers et moultes furent les rumeurs villageoises. Or donc, le Sir avançait vers le crépuscule de son existence et il en portait forts ombrages. Il partit en quêste pour se garantir une jouvence pérenne. Sous les combes de la haute futaie, un signe lui fut envoyé. Il ne tergiversa guère. Au cou de l’animal cornu, il put se repaître. Il jouit alors de la jeunesse et d’ardente vitalité. Les années passant et trépassantes, Il garda par devers lui l’essence vitale de son infortunée victime, comme d’austres conservaient le vin. Vampire, ainsi fut le surnom qu’on lui donna. Le Sir se réjouissait quand des âmes égarées demandaient chemin, il pouvait à ce moment assouvir…
Le héros au bouclier se retourna en entendant la porte claquer. Il découvrit alors l’homme au chapeau en appui sur sa cane avec derrière lui la folie et la discrétion. Il n’hésita alors point la moindre seconde. Il devait sauver les femmes du château.
– ToyNoc réglons cela dans les règles de l’art. Un combat jusqu’à capitulation totale !
– C’est SIR ToyNoc petit effronté. Tu n’es pas digne de mourir de mon épée et puis que vas-tu faire sans stèle ?
Ce fut alors au tour de Jack de sourire. Un sourire à faire retourner les spectres des lieux dans leurs tombes. Il avait ce petit côté diabolique et calculateur. Il dégaina son épée sous l’œil rieur du maître des lieux. Il la pointa sur son adversaire à distance comme quand on lance un défi puis murmura quelques mots en dessinant quelques formes de la pointe de l’épée. Discrétion et Folie se retournèrent alors vers l’homme à cane.
– Tu n’es pas le seul à connaitre des tours.
L’épée n’était qu’illusion. Celle-ci disparut laissant place à une stèle. Une rune d’attaque. Le sir s’était fait avoir par la ruse du plus jeune. Ce dernier savait qu’il ne pourrait pas rivaliser dans un combat magique à la loyale. Le Sir était bien plus fort et expérimenté. Mais, Jack avait beaucoup appris en cherchant sa sœur. Il s’était entraîné et gardait toujours deux stèles. La première celle qu’il avait acheté en entrant à l’école. La seconde dont la longue garde faisait penser à celle d’une épée et pourtant la magie s’en échappait.
– Par quel prosdige as-tu…
– Un peu de silence !
Deux dessins. Une statue remplaça l’homme. Le jeune homme tomba à genoux. Il était à bout d’énergie. Près de lui la femme s’était approchée et l’aida avec précaution à se redresser. Elle avait un regard rempli de culpabilité. Et pourtant elle n’était pas responsable. Elle s’était fait manipuler comme les deux jumelles.
En repensant à cela, Jack lança un dernier sort. Un appel. Un lionceau sortit de sa baguette et fonça vers les cachots. Le lieu reculé atténuait l’emprise de l’homme pierre. Depuis que ce dernier ne pouvait plus se mouvoir à cause du sort principalement réservé pour solidifier les sols et objets, son contrôle sur le château semblait avoir disparu. Et, une fois les deux jeunes femmes les ayant rejoints, des présentations et explications s’imposèrent et la femme chat prit la parole.
– Je tiens à vous remercier de votre aide, je suis Jane Doe, initiée-détective, je me charge principalement de disparitions d’enfants. Un jour, les parents des deux jeunes filles ici présentes sont venus me voir pour m’engager. J’ai remonté leurs traces jusqu’à ce château, mais je n’arrive pas à me souvenir de ce qui s’est passé après. Je sais juste que mon esprit ne contrôlait plus mon corps. Si vous permettez, je tiens à vous exprimer ma gratitude, je vous dois une faveur, n’hésitez pas si je peux faire quoique ce soit pour vous.
– Ramenez simplement ces deux jeunes à leurs parents, ils doivent être bien malheureux et puis cet homme… Il faudrait expliquer à la police runique.
– Je m’en occupe. Il va passer quelque temps à l’ombre. Merci encore
– Merci Jack, de nous avoir sauvées.
La jeune femme demanda aux jeunes filles de la tenir pendant qu’elle-même attrapait la statue. Elle sortit de sa poche un stylo et appuya après un sourire sur le bouton. Dans un bruit sourd, les quatre personnes disparurent.
Ce n’est pas un peu simple le coup du stylo magique ?
Tu vois un moyen plus cohérent pour faire voyager quatre personnes ?
Pas faux on peut dire qu’elle le gardait en cas d’urgence, mais n’a pas pu l’utiliser à cause du contrôle mental ?
Oui on va dire cela… Tu me laisses terminer ?
Bien sûr… Même si je devine déjà la fin.
La sœur prit la main de son frère. Un regard puis ils n’étaient plus. Le château retrouva son calme d’antan. Il n’avait plus de maître, mais bientôt un étranger se perdrait de nouveau dans ces contrées françaises reculées et prendrait à son tour le contrôle des lieux. Mais en attendant, suivons une dernière fois notre héros aux mille mystères.
Le frère et la sœur venaient d’arriver devant l’entrée de la maison. Maison où la mère pleurait, n’ayant plus de nouvelles de son fils après avoir perdu son aînée. Un toc contre le bois. Des pas dans la maison. La porte s’ouvrit timidement. Puis la femme eut une expression indescriptible qui lui passa sur le visage. Ses enfants étaient de retour. Elle n’en revenait pas. Elle n’en croyait pas ses yeux. Elle les fit entrer avec précipitation et Jack referma la porte avant de rejoindre l’accolade familiale.
Ainsi s’achève notre histoire. La famille était de nouveau au complet pour le plus grand plaisir de tous. Et leur aventure fit le tour du village, un conte pour enfants dont le chevalier blanc portait le nom de Jack le brave et dont le méchant n’était autre que le Sir ToyNoc…
FIN, fermeture de rideaux.
Le public se leva. Les jeunes avaient réussi à les faire retourner en enfance, le temps d’un spectacle. Qui aurait cru qu’un simple concours d’improvisation sur le thème des contes donnerait une histoire pareille ?